Jean de La Bruyère (1645-1696) est un moraliste du XVIIe siècle, contemporain de la période classique marquée par l'ordre, la raison et la quête de clarté dans le langage. Il est connu pour ses Caractères (1688), une œuvre qui s'inspire d'auteurs antiques comme Théophraste, et se caractérise par son style vif et moraliste. L’œuvre critique les mœurs et les travers de ses contemporains, à travers des portraits incisifs et satiriques. Dans le portrait d'“Acis”, La Bruyère s'attaque aux discours pompeux et obscurs. Le passage étudié y critique leur prétention, et valorise un langage simple et intelligible.
Comment La Bruyère, à travers l'ironie et la satire, dénonce-t-il les travers du langage ampoulé et valorise-t-il la clarté et la simplicité ? Dans un premier temps, nous observerons la dénonciation de la complexité inutile de la ligne 1 à 7, puis, dans un second temps, le réquisitoire contre les « diseurs de Phœbus », de la ligne 8 à 15.
I. La dénonciation de la complexité inutile (lignes 1 à 7)
a) L'opposition entre les formules alambiquées et les phrases simples
Le passage s'ouvre avec une série de questions rhétoriques et exclamatives : « Que dites-vous ? Comment ? Je n'y suis pas. ». Ces interrogations traduisent l'incompréhension feinte de l'auteur face au discours alambiqué d'Acis. La répétition « vous plairait-il de recommencer ? » renforce l'effet comique et met en lumière l'inefficacité de l'expression compliquée. Le ton ironique est évident dès les premières lignes, soulignant le ridicule de ce type de discours.
L'auteur oppose des phrases simples et directes « Il fait froid », « Il pleut, il neige » au discours inutilement élaboré d'Acis. Par cette juxtaposition, La Bruyère valorise un langage clair, compréhensible par tous, et dénonce l'obscurité volontairement recherchée. La structure répétitive des exemples accentue l'idée d'une simplicité universelle et accessible. En montrant des alternatives claires, il ridiculise indirectement Acis et son incapacité à communiquer efficacement.
b) Une complexité qui cache un discours creux
Le texte suggère que la complexité du discours d'Acis résulte davantage d'une volonté de se distinguer que d'une réelle profondeur intellectuelle. Cette critique est explicite lorsqu'il est mentionné : « cela est bien uni et bien clair ; et d'ailleurs, qui ne pourrait pas en dire autant ? » La Bruyère s'attaque ici à une fausse éruditio