Rousseau, Émile: Illusion et vérité

Corrigé d'une étude de texte fait par un élève.

Dernière mise à jour : 31/08/2021 • Proposé par: mama25 (élève)

Texte étudié

La première fois qu'un enfant voit un bâton à moitié plongé dans l'eau, il voit un bâton brisé: la sensation est vraie; et elle ne laisserait pas de l'être, quand même nous ne saurions point la raison de cette apparence. Si donc vous lui demandez ce qu'il voit, il dit: "Un bâton brisé", et il dit vrai, car il est très sûr qu'il a la sensation d'un bâton brisé. Mais quand, trompé par son jugement, il va plus loin, et qu'après avoir affirmer qu'il voit un bâton brisé, il affirme encore que ce qu'il voit est en effet un bâton brisé, alors il dit faux. Pourquoi cela? parce qu'alors il devient actif, et qu'il ne juge plus par inspection, mais par induction, en affirmant ce qu'il ne sent pas, savoir que le jugement qu'il reçoit par un sens serait confirmé par un autre.
Puisque toutes nos erreurs viennent de nos jugements, il est clair que si nous n'avions jamais besoin de juger, nous n'aurions nul besoin d'apprendre; nous ne serions jamais dans le cas de nous tromper; nous serions plus heureux de notre ignorance que nous ne pouvons l'être de notre savoir.

Rousseau, Émile ou De l’éducation - Livre III

Jean Jacques Rousseau est un philosophe du XVIIIe siècle, le siècle des lumières, qui a notamment participé à l'élaboration de L'encyclopédie. Dans ce texte, le thème principal est la recherche de la vérité, en particulier l'origine de nos erreurs et la notion de bonheur liée à cette quête de la vérité. L'auteur critique ici l'opinion commune qui affirme que la réalité correspond à nos jugements issus des sensations que nous ressentons. Rousseau se pose donc des questions sur l'origine de nos erreurs. On peut notamment formuler le problème posé ainsi: "Quelle est l'origine de nos erreurs et comment atteindre le bonheur malgré la prédominance de ces dernières?"

Pour y répondre, Rousseau avance la thèse suivante: pour lui, ce sont nos jugements qui sont à l'origine de nos erreurs. Ainsi, l'ignorance, qui ne nous donne pas la capacité de juger, nous empêche de commettre des erreurs, et on peut donc vivre heureux. Afin de défendre cette thèse, l'auteur utilise une stratégie argumentative particulière. Le texte est séparé en deux paragraphes qui ont deux fonctions différentes: dans le premier paragraphe, Rousseau nous fait réfléchir sur l'origine de nos erreurs à travers un exemple simple qui illustre sa thèse, à savoir un enfant voyant un bâton plongé dans l'eau. L'auteur explique le raisonnement de l'enfant: c'est en quelque sorte la partie pratique. Ensuite, l'auteur reprend cet exemple en nous expliquant d'où vient l'erreur de l'enfant: c'est la partie théorique. Enfin, le deuxième paragraphe est une conclusion: il y formule sa thèse et nous donne une proposition de conduite en quelque sorte utopique pour être heureux, puisque Rousseau admet implicitement que cette conduite n'est pas possible. On peut cependant se demander si la thèse de l'auteur ne présente-t-elle pas de limites. Les jugements sont-ils l'unique source de nos erreurs? Est-ce mieux de vivre dans l'ignorance comme le préconise Rousseau ?

I. Analyse linéaire

L'idée principale de ce texte traite ici de l'origine de nos erreurs. Afin de mieux faire comprendre la thèse qu'il défend, Rousseau a adopté une structure argumentative particulière.

Le premier paragraphe sert d'exemple pour illustrer les propos de l'auteur, qui a délibérément choisi d'utiliser un exemple simple et concret pour que tout le monde puisse se représenter ce dont il parle. Rousseau veut porter notre attention sur la différence qui existe entre nos sensations, qui sont vraies, et les jugements que

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