Rousseau, Les Confessions - Livre I: Le peigne cassé (extrait 3)

Commentaire en trois parties:
I. violence du mal, de l’injustice à l’origine de son émotion révoltée,
II. Rôle du tempérament de Jean Jacques sur son comportement,
III. importance de l’écriture dans l’évocation du souvenir pour mieux convaincre le lecteur

Dernière mise à jour : 15/09/2021 • Proposé par: objectifbac (élève)

Texte étudié

Je sens en écrivant ceci que mon pouls s’élève encore ; ces moments me seront toujours présents quand je vivrais cent mille ans. Ce premier sentiment de la violence et de l’injustice est resté si profondément gravé dans mon âme, que toutes les idées qui s’y rapportent me rendent ma première émotion, et ce sentiment, relatif à moi dans son origine, a pris une telle consistance en lui-même, et s’est tellement détaché de tout intérêt personnel, que mon cœur s’enflamme au spectacle ou au récit de toute action injuste, quel qu’en soit l’objet et en quelque lieu qu’elle se commette, comme si l’effet en retombait sur moi. Quand je lis les cruautés d’un tyran féroce, les subtiles noirceurs d’un fourbe de prêtre, je partirais volontiers pour aller poignarder ces misérables, dussé-je cent fois y périr. Je me suis souvent mis en nage à poursuivre à la course ou à coups de pierre un coq, une vache, un chien, un animal que j’en voyais tourmenter un autre, uniquement parce qu’il se sentait le plus fort. Ce mouvement peut m’être naturel, et je crois qu’il l’est ; mais le souvenir profond de la première injustice que j’ai soufferte y fut trop longtemps et trop fortement lié pour ne l’avoir pas beaucoup renforcé.

Rousseau, Les Confessions - Livre I

Introduction

Chez les Lamberciers, ou Rousseau vit entre 10 et 12 ans, il est accusé d’avoir cassé un peigne alors qu’il est innocent. Cependant, les apparences sont contre lui. Le récit des confessions peint alors cet épisode comme un traumatisme., et comme une rupture dans la vie de l’enfant, la violence de l’injustice trouble l’univers paradisiaque de Bossey. La pureté, la confiance disparaissent, et les adultes perdent leur aura (confiance idéalisée, infaillibilité). L’expérience de cette innocence bafouée, déclenche tout, tout d’abord un sentiment de violence ("Carnifex"), puis dans notre texte, Rousseau pratique un travail d’explication et d’analyse. Il nous dit l’histoire personnelle d’un sentiment de révolte contre l’abus de la force, mais c’est aussi un travail rhétorique (art du discours) qui l’aidera à transmettre à son lecteur la vigueur de ce sentiment.

I. violence du mal, de l’injustice à l’origine de son émotion révoltée

a. Force du puissant, loi du plus fort

Il y a présence d’un champ lexical de la souffrance : "violence", "cruauté", "subtiles noirceurs", "mis en nage" et "tourmenter". L’injustice est synonyme de violence, de mal. La loi du plus fort est clairement marquée dans ce texte.

Il y aussi des indices de présence d’un pouvoir moral ("prêtre"), politique ("tyran") et physique ("animal"). La loi du plus fort est présente sur tous les plans.

b. l’origine est une marque indélébile

On remarque le champ lexical de l’origine, du marquage : "premier sentiment " "profondément gravé dans mon âme" "idées qui s’y rapportent" "première émotion" "origine" "ce sentiment a pris une telle consistance"

Il y de plus une hyperbole : "ces moments me seront toujours présents quand je vivrais cent mille ans"

Tout cela montre l’impact de cette injustice sur Rousseau dans la passé...

...mais aussi dans le présent : "est resté". L’utilisation du présent nous montre que l’impact est toujours de mise aujourd’hui.

II. Rôle du tempérament de Jean Jacques sur son comportement

a. compassion naturelle

- "je partirais volontiers (..) dussé-je cent fois y périr ". L’hyperbole est utilisée ici pour montrer l’importance pour Rousseau de vouloir défendre les victimes d’injustice.

b. justification de ses actes

- "ce mouvement peut m’être naturel". Ceci

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