Baudelaire, Salon de 1845 - La Madeleine dans le désert

I. La disparition élocutoire du descripteur,
II. Modernité de Delacroix,
III. L’art de Delacroix,
IV. La prose poétique

Dernière mise à jour : 15/09/2021 • Proposé par: chewif (élève)

Texte étudié

C’est une tête de femme renversée dans un cadre très-étroit. À droite dans le haut, un petit bout de ciel ou de rocher — quelque chose de bleu ; — les yeux de la Madeleine sont fermés, la bouche est molle et languissante, les cheveux épars. Nul, à moins de la voir, ne peut imaginer ce que l’artiste a mis de poésie intime, mystérieuse et romantique dans cette simple tête. Elle est peinte presque par hachures comme beaucoup de peintures de M. Delacroix ; les tons, loin d’être éclatants ou intenses, sont très-doux et très-modérés ; l’aspect est presque gris, mais d’une harmonie parfaite. Ce tableau nous démontre une vérité soupçonnée depuis longtemps et plus claire encore dans un autre tableau dont nous parlerons tout à l’heure ; c’est que M. Delacroix est plus fort que jamais, et dans une voie de progrès sans cesse renaissante, c’est-à-dire qu’il est plus que jamais harmoniste.

Baudelaire, Salon de 1845 - La Madeleine dans le désert

Le XIXe siècle voit la consécration de la critique d’art comme genre littéraire. Les Salons y jouent un rôle essentiel. C’est un grand siècle pour la peinture (David, Ingres, Delacroix, Cézanne...) avec un renouvellement permanent des formes. Les expositions de peinture se multiplient. Les Salons ont lieu tous les deux ou trois ans. On commente de plus en plus les événements d’actualité. Mais la critique technicienne est rare. Ce sont les amateurs, les " dilettante " qui écrivent. Le développement des " cénacles ", continuation des " salons mondains " du XVIIIe siècle, permet d’offrir des foyers de réunion à tous les artistes, de donner lieu à des conversations qui confrontent les techniques et les inspirations.

On a souligné l’amour héréditaire de Beaudelaire pour la peinture, qui lui permet parallèlement de formuler son manifeste poétique. Avec Baudelaire, s’ouvre la voie de la littérature contemporaine, pour laquelle la création artistique est impensable sans son corollaire nécessaire, la réflexion critique sur l’art.

Ses maîtres sont Diderot, dont il annote l’Essai sur la peinture et les Pensées détachées, et Balzac, dont il lit le Chef-d’œuvre inconnu, qui lui apporte la révélation de l’inachèvement dans la toile, source de beauté - " Rigoureusement, le dessin n’existe pas " -, et du modèle sculptural, les sculpteurs approchant plus de la vérité que les peintres. Delacroix dira qu’il faut " masser avec la couleur, comme les sculpteurs avec la terre ". Pour Diderot comme pour Balzac et B., il ne s’agit pas de copier la nature, mais de l’exprimer.

Dans cette plaquette très brève que compose le Salon de 1845, La Madeleine dans le désert est classée parmi les " tableaux d’histoire ". C’est un sujet mythologique et sacré.

I. La disparition élocutoire du descripteur

A. Le " je " est absent

On note la même volonté que chez Diderot de faire disparaître le locuteur-descripteur. L’énoncé titre parle de " la Madeleine " reprise par un système de désignation par le présentatif ou le démonstratif qui donnent à voir un spectacle : " C’est une tête ", " cette simple tête ", " Ce tableau ".

B. Le " je " est inclus dans un " nous " dont l’extension est vague

Faut-il le gloser par " je " + les dilettante, les amateurs d’art ? ou par un " nous " de modesti

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