Schopenhauer, Le monde comme volonté: Le bonheur

Annale bac 2009, Série L - France métropolitaine

Corrigé en trois parties suivi d'une discussion sur la thèse de l'auteur.

Dernière mise à jour : 16/03/2021 • Proposé par: nbernard (professeur)

Texte étudié

La satisfaction, le bonheur, comme l'appellent les hommes, n'est au propre et dans son essence rien que de négatif , en elle, rien de positif. Il n'y a pas de satisfaction qui, d'elle-même et comme de son propre mouvement, vienne à nous , il faut qu'elle soit la satisfaction d'un désir. Le désir, en effet, la privation, est la condition préliminaire de toute jouissance. Or, avec la satisfaction cesse le désir, et par conséquent la jouissance aussi. Donc la satisfaction, le contentement, ne sauraient être qu'une délivrance à l'égard d'une douleur, d'un besoin , sous ce nom, il ne faut pas entendre en effet seulement la souffrance effective, visible, mais toute espèce de désir qui, par son importunité, trouble notre repos, et même cet ennui qui tue, qui nous fait de l'existence un fardeau. Maintenant, c'est une entreprise difficile d'obtenir, de conquérir un bien quelconque , pas d'objet qui ne soit séparé de nous par des difficultés, des travaux sans fin , Sur la route, à chaque pas, surgissent des obstacles. Et la conquête une fois faite, l'objet atteint, qu'a-t-on gagné ? Rien assurément, que de s'être délivré de quelque souffrance, de quelque désir, d'être revenu à l'état où l'on se trouvait avant l'apparition de ce désir. Le fait immédiat pour nous, c'est le besoin tout seul, c'est-à-dire la douleur. Pour la satisfaction et la jouissance, nous ne pouvons les connaître qu'indirectement : il nous faut faire appel au souvenir de la souffrance, de la privation passées, qu'elles ont chassées tout d'abord. Voilà pourquoi les biens, les avantages qui sont actuellement en notre possession, nous n'en avons pas une vraie conscience, nous ne les apprécions pas , il nous semble qu'il n'en pouvait être autrement , et en effet, tout le bonheur qu'ils nous donnent, c'est d'écarter de nous certaines souffrances. Il faut les perdre, pour en sentir le prix , le manque, la privation, la douleur, voilà la chose positive, et qui sans intermédiaire s'offre à nous.

Schopenhauer, Le monde comme volonté et comme représentation

Introduction

A travers l'analyse de la notion de désir, elle-même directement liée à l'idée que les hommes se font du bonheur, et dans la mesure où le bonheur serait en quelque sorte la résultante de la satisfaction de ce désir - Schopenhauer, philosophe allemand du 19ème siècle, nous livre une vision pessimiste ou négative de la manière dont sont organisés les désirs humains. Le désir correspond essentiellement, à travers la conception qu'il nous en présente, à un manque que les hommes ne pourraient jamais combler. Pour trouver le bonheur, il faudrait renoncer aux désirs, jamais satisfaits, toujours renouvelés. Le caractére insatiable du désir l'annule en effet comme condition de possibilité du bonheur.
Dans le premier moment de ce texte, Schopenhauer explique que le désir est une sorte de moteur à travers lequel, par la satisfaction de ce désir, nous pourrions accéder au bonheur. Mais il n'en est rien, puisque la satisfaction du désir, provoquant la disparition de ce désir, provoque en même temps la disparition du bonheur qui aurait pu résulter de cette satisfaction. Dans un second temps, le philosophe allemand explicite la thèse selon laquelle le désir, orienté vers la "conquête" d'un bien, n'aboutit jamais, contrairement à ce que l'on pouvait espérer, à la possession véritable de ce bien. Le désir est essentiellement défini, dans ce passage du texte, comme "besoin", lequel est lié à une "douleur". Schopenhauer en conclut, dans un troisième moment, que le désir, parce qu'il est fondamentalement lié à un manque, ne peut en aucun cas être lié à un plaisir : il ne représente que le symptôme d'un manque ontologique, c'est-à-dire constitutif de l'essence même de l'homme, lui-même associé à une souffrance. Le seul bonheur que nous puissions expérer, c'est celui que nous procure la cessation des souffrances.

Partie I

Schopenhauer n'établit pas de distinction véritable entre la satisfaction et le bonheur, et ne semble pas s'embarrasser, par conséquent, de ce qui les différencie. Traditionnellement en effet, dans l'histoire de la philosophie, la satisfaction est un état transitoire, non durable, que procure la réalisation de certains désirs, la concrétisation de certains espoirs, mais qui ne suffisent pas à construire un bonheur véritable, même s'ils peuvent contribuer à ce bonheur. En outre, le bonheur est considéré comme un état durable, auquel seul, d'après Aristote ou d'après Platon, le philosophe pouvait prétendre accéder. Le bonh

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