Y a-t-il un devoir de prendre conscience ?

Devoir à la maison, entièrement rédigé.

Dernière mise à jour : 08/01/2023 • Proposé par: Gab1011 (élève)

La « madeleine de Proust » est une expression française devenue courante de nos jours, pas seulement parce qu’elle est un passage de la Recherche du temps perdu, mais aussi et surtout parce qu’elle décrit la première fois où le jeune Marcel prend conscience de la valeur et de la fugacité de ses souvenirs. En soit, Proust manifeste d’une certaine façon la tension qui anime chacun de nous ; celle de la peur engendrée par l’inconsistance de notre vie. On souhaiterait fuir cette réalité, fuir notre conscience, car cette prise de conscience est douloureuse, mais pour autant on ne peut se voiler la face et vivre dans l’illusion, prendre conscience permet d’avancer et d’accéder à une connaissance supérieure.

La prise de conscience est en soi l’ouverture du nous, c’est-à-dire du sujet sur le monde et l’ouverture du sujet dans le monde. Cette action est le début de notre quête à la vérité, mais pour autant est-elle nécessaire ; Est-ce un devoir ? Pendant l’enfance évidemment que non, mais en grandissant avons-nous un devoir social de prendre conscience ? L’homme ayant une liberté et la chérissant, il peut décider s’il veut entreprendre cette recherche de la conscience. Mais cet effort n’est pas des plus faciles voir même éprouvante, car l’existence humaine est semée d’embûches et de douleurs à telle point que parfois nous préférerions nous passer de notre conscience, de ce bagage rempli de souffrance si lourd à porter.
 
On peut alors se demander si l’homme devrait-il souhaiter prendre conscience ?  Nous verrons dans un premier temps en quoi l’homme pourrait vouloir fuir sa conscience puis dans un second temps nous montrerons en quoi prendre conscience permet à l’homme de devenir meilleur.

I. La prise de conscience est un poids dans la vie de l'homme

De notre conscience, de notre prise de conscience se développent des sentiments de culpabilité et de remords, qui nous rappellent inlassablement les erreurs que nous avons pu faire tout au long de notre vie. Ou bien lorsqu’on perd un être cher ou lors d’un chagrin d’amour ; la douleur est énorme d’autant plus qu’elle est mentale. La conscience devient alors un organe dont on voudrait l’ablation, mais elle reste et oblige l’homme à porter le poids de son passé. Selon Nietzsche : « la conscience affaiblit les forts, en leur convainquant que leur puissance est le mal. ». Nietzsche critique fortement cette « mauvaise conscience » qui provient de ce sentiment de culpabilité, qui conduit à retourner sa propre force contre soi-même. C’est une « morale d’esclave », nous devenons là l’esclave de notre conscience, la conscience nous enlève donc notre liberté, nous aurons toujours un œil au-dessus de nous qui nous regarde et nous juge pour chaque action que nous faisons. C’est ce que Victor Hugo exprime dans son poème « La conscience » : « L’œil était dans la tombe et regardait Cain ». La conscience prend donc la figure vengeresse de l’œil de Dieu qui nous dit coupable ou innocent par-delà les lois humaines. Prendre conscience signifie donc de savoir qu’on est jugé pour le moindre de nos actes et ceci inévitablement, un homme pour sa tranquillité préférera donc de ne pas entreprendre ce chemin et de rester dans l’illusion.
 
De plus la conscience est aussi le résultat de l’intériorisation des règles de fonctionnement social comme le souligne Durkheim, toute notre enfance nous recevons des ordres de nos figures parentales, la conscience est le formatage. De ces ordres sur le « nous ».  Ces règles refoulent toutes nos pulsions qui sont condamnables par la société c’est ce que Freud appelle le « moi ». Notre conscience n’est donc pas universelle comme l’affirme Kant, elle est le fruit d’un conditionnement, elle devient alors contingente et relative d’une société à une autre. Ce conditionnement dès l’enfance nous empêche d’être nous-mêmes, elle nous prive donc de notre liberté. Or la liberté est la raison pour laquelle la vie vaut la peine d’être vécue, nous sommes juste un automate privé de personnalité et de volonté, un automate de la société. La conscience devient donc le carcan aliénant de l’être. L’homme peut feindre d’être heureux et libre en arrêtant de réfléchir, en paralysant sa réflexion, n’en soit en ne prenant pas conscience de ce qui se passe.
 
Également la conscience est la preuve de l’existence de l’homme, que l’homme vit, mais toutefois ceci entraîne que dès notre plus jeune âge, nous soyons confrontés à une peur : la peur de la mort.  Bien évidemment savoir qu’on vit est intimement lié à la mort, mais cette peur de la mort ne fanerait-elle pas notre expérience de la vie ? On comprendrait donc le carpe diem épicurien : « cueille le jour », la vie est trop courte et elle se doit d’être vécue donc profite de la vie, profite des plaisirs. En soit une sorte de divertissement pascalien pour oublier que la vie s’arrêtera bien à un moment et elle s’arrêtera toujours trop tôt.  « Chacun de nous quitte la vie avec le sentiment qu'il vient à peine de naître. »  L’homme sera toujours insatisfait de l’expérience de son existence, d’autant plus s’il vit sans satisfaire ses envies.

La prise de conscience ne serait ainsi qu’une perte de temps, un effort futile à notre matérialisme épicurien et nous rappelant en permanence nos erreurs et manquements aux règles. Mais ne jamais affronter sa conscience n'est-il pas un problème pour l'homme ? En quoi prendre conscience reste un devoir ?

II. Mais la prise de conscience est ce qui permet à l'homme de devenir meilleur

La conscience est de par sa nature même ce qui nous rapproche le plus possible de la liberté, et même plus elle nous rapproche en soit à l’omnipotence de Dieu comme dit Rousseau dans Émile ou de l’éducation : « Conscience ! Conscience ! Instinct divin, immortelle et céleste voix ; guide assuré d'un être ignorant et borné, mais intelligent et libre ; juge infaillible du bien et du mal, qui rend l'homme semblable à Dieu ». Ici Rousseau célèbre donc la conscience en exprimant son origine divine, elle est celle qui dans un être fini rapproche l’infini qu’est Dieu. Elle est l’origine de notre liberté, de notre libre arbitre. Pour autant elle reste une guide, car la conscience ne nous ordonnera jamais l’action à faire. La conscience reste un avis qu’on peut ignorer, de qui on peut se détourner, mais alors ceci entraînera qu’on devienne un être déchu, une créature sans aucune discipline et de morale, nous devons donc « prendre conscience » à fin d’aller au-delà de notre condition humaine, on pourra alors atteindre l’excellence.
 
De plus la conscience est la marque de la raison, cette raison qui nous dicte la loi, celle-ci étant universelle. Par exemple, « commettre un meurtre » est effroyable. La raison même perçoit cela comme étant contre nature. Selon Kant ceci est l’impératif catégorique comme il exprime dans les Fondements de la métaphysique des mœurs : « Agis uniquement d’après la maxime qui fait que tu peux vouloir en même temps qu’elle devienne une loi universelle ». La maxime étant un dogme sur une règle de conduite.  Donc l’universalité est donc la preuve irréfutable de la vérité. Or selon lui cette universalité repose sur la bonne volonté, cette bonne volonté consiste dans la pureté des intentions désintéressées qui dictent nos actions, par essence donc la conscience morale est le bien. L’homme souhaitant par nature se dirigé vers le bien devra donc faire l’effort de prendre conscience.
 
La prise de conscience est intimement liée au savoir du monde, or tout homme par définition veut savoir, c’est dans leur être au plus profond, comme le dit Aristote dans ses Métaphysiques : « Tous les hommes ont par nature le désir de connaître ». La connaissance permet à l’homme une supériorité par rapport aux autres espèces. Grâce à elle l’être est capable de se définir comme objet pensant et étant doté d’éthique. Comme l’exprime Rabelais « science sans conscience n’est que ruine de l’âme ». Pour lui chaque élément doit être perçu sous un angle de réflexion par rapport à l’éthique et donc par rapport à la conscience. La conscience doit donc être omniprésente dans toutes les actions de notre vie, elle est l’outil pour vivre placidement, car sinon la vie n’est que ruine.

En soit notre conscience est l’atout de notre vie elle permet de nous transcender, elle a un côté divin pour autant certains sentiments négatifs ressortent de cette conscience.

Conclusion

En soi, l’homme pourrait tout aussi bien vouloir fuir sa conscience sans vouloir l’affronter, mais l’homme n’atteindrait-il pas une grandeur encore plus haute en affrontant les douleurs que sa conscience lui laisse entrevoir ? La conscience est donc la misère de l’homme, mais elle est également sa grandeur, en donnant les forces de la surmonter. Elle est par sa nature même le rappel à l’homme qu’il reste un élément de la nature, un être mortel comme l’indique Pascal « l’homme est un roseau, le plus faible de la nature, mais un roseau pensant ». C’est là la toute la puissance de l’homme, d’être l’être qui a dépassé l’existence d’un simple objet, mais qui n’a toujours pas atteint celle de l’excellence. La conscience doit juste être assumée afin de pouvoir évoluer, car cette conscience est ce qui définit l’homme, aussi bien la conscience morale que sa mauvaise conscience.