En apprenant sa langue maternelle n'apprend-on qu'à parler ?

Corrigé élève en trois parties, où l'introduction manque.

Dernière mise à jour : 31/08/2021 • Proposé par: docdeath (élève)

I. En apprenant sa langue maternelle, on apprend à parler

a) On apprend à parler au sens large, à utiliser un système de signes.

La parole revoie au langage ; comme tel, elle désigne un système de signes, lesquels sont acquis par convention, c'est-à-dire appris.

En cela, elle s'oppose à la communication animale, qui est biologiquement déterminée dans l'espèce et se présente sous la forme d'un code de signaux. La fonction d'un tel code n'est pas d'exprimer et de communiquer une pensée, mais de déterminer une action, comme lorsqu'une abeille signale à une autre, par les mouvements dessinées dans l'air par son corps, une source de nourriture.

C'est pourquoi la parole, nécessairement humaine en un sens, est transmise par la culture, à travers une langue donnée, qui constitue la langue maternelle de chacun.

b) La parole est la traduction de la pensée de l'homme

Le langage est l'instrument de la pensée, qu'il traduit. Telle est la position adoptée par la philosophie classique comme par le sens commun : la pensée, innée et déjà maîtresse d'elle-même avant de se concrétiser dans des mots, n'a besoin du support de la parole que pour être communiquée.

Transition

Si la parole est la traduction extérieure d'une pensée déjà faite, qui est censée lui préexister, comment se fait-il que la pensée ne se développe qu'à travers la parole, comme le montre, à contrario, le cas de l'enfant sauvage?

II. En apprenant sa langue maternelle, on apprend une culture

a) On s'initie à une certaine vision culturelle du monde

Chaque langue reflète et détermine une vison du monde. La preuve en est que, en apprenant une langue étrangère, l'anglais par exemple, on n'apprend pas qu'à la parler : on s'initie à une autre forme de pensée, à une autre conception du monde. Les mots renvoient donc à des concepts qui, pour une langue donnée, structurent de manière spécifique la réalité.

b) En apprenant sa langue maternelle, on apprend à former et ordonner ses idées

L'acquisition progressive de la langue, transmise par l'éducation, apprend à l'enfant à lier entre eux des signes abstraits, dépourvus de sens par eux-mêmes : « p » et « as » n'ont pas de signification individuellement mais ensemble ils forment le mot « pas ». Mais le mot lui-même, hors de la phrase dans laquelle il se trouve, n'a pas de sens fixe.

Ainsi le mot chien peut-il, suivant le contexte linguistique, désigner une constellation céleste ou, comme le remarque Aristote, un animal aboyant.

Loin qu'un signe corresponde à une idée préformée, comme on le croit communément, le sens et par conséquent la pensée ne naissent donc que de la combinaison des signes entre eux, combinaison abstraite qu'effectue, de manière toujours originale, le sujet de la parole. En cela réside le caractère articulé du langage, qui rend possible la composition d'une infinité de messages à partir d'un nombre limité de signes. Pour cette raison, plus on apprend à un enfant à maîtriser la parole, plus on le rend capable d'abstraction, mieux il pense.

Transition

Il reste que l'acquisition de la langue maternelle ne sert pas seulement à penser mais, pour autant qu'elle se fait par l'intermédiaire d'un autre, à entrer en communication avec lui.

III. En apprenant sa langue maternelle, on prend conscience d'autrui

a) La langue maternelle fait sortir l'individu du cercle étroit de ses expériences

En apprenant sa langue maternelle, on apprend à exprimer des sentiments et des émotions, à travers des signes communs. Ainsi se déprend-on progressivement du vécu et de l'expérience rigoureusement individuelle qui nous isole et nous retiennent en nous-même, pour les extérioriser dans des mots que l'on partage avec d'autres.

b) La parole nous met immédiatement en présence d'autrui

On apprend sa langue maternelle, le plus souvent, par la médiation de la parole. Précisément, la parole, plus encore que l'écriture ou le langage gestuel, met immédiatement en présence d'autrui, quelle fait reconnaître comme un autre soi-même.

Conclusion

En apprenant sa langue maternelle, on n'apprend pas qu'à parler, mais on devient le sujet d'une parole, et, ce faisant, on apprend à penser et à exister en relation avec d'autres, on est introduit dans un monde humain.