Tout homme paraît sensible à la beauté: cela signifie t-il qu'il s'agit, dans tous les cas, de la même beauté, et que la satisfaction de chacun est de même nature? Quelle que soit la diversité constatée l'attention à la beauté semble néanmoins universelle, et c'est bien cette universalité qui peut faire question : pourquoi les êtres humains sont ils tous sensibles à (ce qu'ils nomment) la beauté? Quelle satisfaction peut elle leur apporter? Ce manifestant d'abord pour les sens, la beauté ne s'adresse t'elle qu'à ceux-ci ou doit on admettre qu'au delà de la sensibilité, elle concerne l'esprit? Si tel est le cas, à quel domaine spirituel vient elle faire, plus ou moins directement, écho, de façon à nous satisfaire?
I. La beauté : une ou multiple?
A. Beauté naturelle, beauté artistique
Définir la beauté n'est pas chose facile, en raison de la diversité des expériences auxquelles peut répondre ce terme. On évoque volontiers la "beauté" d'un paysage ou d'un coucher de soleil, celle d'une personne ou même d'un animal, autant que celle d'une statue antique, d'une architecture ou d'un chef d'oeuvre de la peinture - qu'il s'agisse de la Joconde ou d'un autoportrait de Rembrandt. Les occasions de rencontrer la beauté semblent donc multiples : elle serait alternativement dans la nature, dans les corps ( notamment humains, des lors peut naturels) ou dans des oeuvres d'art. Cette diversité des "supports" de la beauté rend évidemment difficile d'en élaborer une conception unifiée.
B. Beauté adhérente, beauté libre
Il est des lors bien compréhensible que Kant est tenu, précisément, à distinguer deux catégories de la beauté : celle qui qualifie d' "adhérente" d'une part, que l'on rencontre dans la nature ( une fleur ou un cheval ) mais aussi dans tout ce qui correspond à un usage ou à une fin (une cathédrale); celle d'autre part qui est "libre", en ceci qu'elle se manifeste comme "force de la finalité d'un objet en tant qu'elle y est perçue sans la représentation d'une fin". Cette finalité "interne" ou "intrinsèque" caractérise les oeuvres d'art comme soumises à une élaboration telle qu'on ne puisse rien en retrancher ou y ajouter. Elle met au premier plan leur structuration, leur cohérence, en l'absence de laquelle il n'y aurait pas d'oeuvre puisque les différents éléments qui la constituent se seraient pas liés entre eux et resteraient non unifiés.
C. Variabilité historique et culturelle de la beauté
Encore Kant se souc