Esope, Fables - L'Aigle et la Renarde

Commentaire en trois parties:
I. Les animaux, représentatifs de la société,
II. La justice humaine,
III. La justice divine.

Dernière mise à jour : 03/05/2021 • Proposé par: objectifbac (élève)

Texte étudié

S'étant liés d'amitié, un aigle et une renarde avaient décidé de devenir voisins, afin que l'habitude resserre leurs liens. L'aigle s'éleva donc au sommet d'un grand arbre et y fit sa couvée ; la renarde se glissa dans le buisson au pied de l'arbre pour y mettre bas. Or un jour qu'elle était sortie en quête de pâture, l'aigle dans la disette fondit sur le buisson et ravit les renardeaux, dont il se régala avec ses aiglons. A son retour, la renarde comprit ce qui s'était produit, et s'affligea non pas tant de la mort de ses petits que de son incapacité à la venger : elle qui vivait sur terre ne pouvait en effet pourchasser un volatile. Aussi dut-elle rester à l'écart et s'en tenir au seul recours des impuissants et des faibles : maudire son ennemi. Cependant l'aigle ne tarda pas à subir le châtiment de son manque de foi. Un jour, à la campagne, au cours du sacrifice d'une chèvre, il emporta de l'autel un viscère encore en feu, qu'il ramena dans son aire. A peine l'avait-il déposé parmi les brindilles qu'un vent violent se leva et fit jaillir d'un vieux fétu une flamme brillante ; les aiglons furent consumés, car ils étaient encore trop jeunes pour voler, et tombèrent sur le sol. La renarde se précipita, et sous les yeux de l'aigle les dévora jusqu'au dernier.

La fable montre que les traîtres à l'amitié échappent peut-être à la vengeance de leurs victimes trop faibles, mais ne sauraient se soustraire au châtiment divin.

Esope, Fables - L'Aigle et la Renarde

Introduction

Esope a été esclave puis a été affranchi. Il sait donc ce que c’est que d’être au bas de l’échelle sociale. Il a voyagé, une expérience qui a influencé ses fables. Ici, il ne fait pas une satire de la société grecque mais des hommes en général.

I. Les animaux, représentatifs de la société

Tout d’abord, aucun personnage n’est emblématique, car la fable est trop ancienne.

Le thème de l’arbre qui représente l’échelle sociale :
- la renarde se terre
- l’aigle vole haut
- la chèvre représente le clergé
Esope est plus proche de la renarde que de l’aigle. Les plus puissants lèsent les inférieurs.

Les personnages sont symboliques de la société : le bouc émissaire (la chèvre) sert à éviter la justice divine, par l’expiation des fautes (cf. la symbolique du bouc émissaire). Il n’y a aucune description pittoresque des animaux, pourtant caractéristique d’Esope. Il évoque les rapports et non pas ce qui les caractérise.

II. La justice humaine

Voler les viscères de ce bouc correspond à un crime, car l’animal est entièrement donné à Dieu. De plus, on lisait l’avenir dans les viscères du sacrifié. Voler les viscères correspond à voler le pronostic sur l’avenir : c’est un énorme crime.

Les rapports entre la responsabilité et la famille sont décrites avec le mot « vendettas »: on tue la descendance pour un meurtre commis par les ancêtres. Également la perpétuation de la vengeance d’une génération à l’autre : « les dévorer jusqu’au dernier » ceci est une mesure de précaution pour éviter toute descendance et donc toute vendetta.

La justice humaine est fondée sur la vengeance, la justice divine cible le coupable (cf : champ lexical de la vengeance). C’est une vengeance plutôt qu’une justice.

III. La justice divine

La rapidité: connecteurs logiques nombreux. La justice divine est rapide, les Dieux ne patientent pas. L'intervention divine ne se fait pas de façon directe, mais par intermédiaires : ici, c’est le vent (une «flamme brillante» en opposition avec «viscère» et «fêter»). Le vent s’arrête car il a ses raisons, c’est le souffle de Dieu. Le vent cible et punit celui qui est coupable, contrairement aux hommes.

Pour les humains, la malédiction consiste à prier pour que l’autre soit puni (l. 9-10-11) . Les Dieux sont toujours plus puissants que les hommes. Or les Dieux grecs sont susceptibles et donc ils punissent énormément. Les hommes sont soumis dès lors à une peur de la divinité, et se tiennent donc correctement. Esope exprime ici la morale de la peur: il n’y a pas d’échappatoire ni de rédemption pour les traîtres.. La victime est elle par contre totalement ignorée.

Esope exprime aussi le rapport entre l’amitié et les pactes. Il y a 2 degrés de traîtrise possibles : le degré personnel, mais aussi étatique avec la guerre. On peut voir ici une allusion à des traités ou à des pactes, avec une notion diplomatique.

Conclusion

Pour la conclusion, possibilité de faire un parallèle avec le texte de La Fontaine « Les obsèques de la Lionne » au niveau des techniques :
- La Fontaine fait la satire de la société, alors que ceci est absent chez Esope. Il n’y a pas de critique sociale.
- Esope ne fait pas de mises en situation, il n’y a pas de discours direct, l’aspect narratif est largement dominant