Faut-il limiter la puissance humaine ?

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Dernière mise à jour : 13/04/2023 • Proposé par: Lana.vcg (élève)

La « puissance humaine » est une expression qui en elle-même évoque l'homme comme un être doué de « puissance », ou en tous les cas comme un être qui sait générer et contrôler la puissance: par le feu, par les outils, par ses mains, par son intellect, et au fur et à mesure de ses découvertes, par la technique, les machines et l'énergie qui les alimente. Cette puissance étant toujours plus grande - on parle désormais entre autres de puissance nucléaire, de puissance quantique, d'intelligence artificielle - il est à se demander si l'homme peut bien toujours être en contrôle. Jusqu'à présent cette puissance à toujours servi l'homme, qui vit mieux, plus longtemps et dans un meilleur confort, et même si les techniques nouvelles offrent toujours leur lot d'inquiétudes, on a toujours fini par les dominer et les rendre inoffensives. Faut-il limiter dès lors limiter la puissance humaine ?

Nous verrons d'abord que le développement humain mène vers l'émancipation. Puis que dans cette même émancipation se trouve une menace existentielle. Qu'enfin il est nécessaire d'encadrer nos découvertes, sous peine de subir plutôt que de jouir de la puissance humaine.

I. Le développement humain

a) La découverte du progrès

Utilisé pour la première fois au XVIe siècle, le “progrès” reflète pourtant l’histoire entière de l’humanité. Effectivement nous ne pourrions parler aujourd’hui de technologies ou de sciences sans un certain perfectionnement humain, un accroissement des connaissances sur le monde, présent depuis l’origine de l’homme. De nos jours, l’opinion publique penserait en majorité et à juste titre que les technologies actuelles découlant du progrès humain sont nécessaires, voire vitales à notre bien-être, et à contrebalancer des effets néfastes dus à la condition humaine (comme les handicaps). En effet le physicien Stephen Hawking n’aurait pu transmettre ses découvertes (à cause de son handicap, il fut pratiquement paralysé), celles-ci permettant de faire avancer la connaissance humaine, sans les technologies nécessaires lui permettant de communiquer.

Néanmoins, étant donné que c’est en découvrant les limites de toute chose que nous arrivons à définir ce qu’elles peuvent être, ou au contraire, ce qu’elles ne doivent être, définir la technique, le progrès, c’est définir ses limites. Dès lors, nous pouvons nous demander, comme toute lumière a sa part d’ombre, quelles seraient les conséquences potentiellement néfastes de la puissance humaine. Il convient en effet de se demander si le progrès est bon ou néfaste. Or, d’après le politologue Bruno Tertrais, dans L’Apocalypse n’est pas pour demain : en finir avec le catastrophisme, il affirme qu’il ne faut pas voir la puissance humaine uniquement comme une notion mauvaise, mais également comme quelque chose de bien qui pourrait apporter des solutions à nos problèmes. Il ne convient donc plus de se demander si le progrès est bon ou néfaste, mais plutôt s’il est utile de progresser, afin d’améliorer la situation actuelle.

Ainsi, les nombreuses découvertes, résultat du progrès humain, nous ont en effet servi à mieux appréhender le monde, à le connaître. Or n’est-ce pas également la connaissance de l’homme qui découle de ce progrès ?

b) La multiplication des découvertes

Dès lors, en quoi le progrès (à différentes échelles) nous a-t-il permis de mieux nous connaître? Et puisque la connaissance humaine, parallèlement à la puissance, ne cesse de croître, ne faudrait-il pas admettre que la connaissance aussi bien du monde que de l’homme est synonyme de puissance ?

Effectivement, le psychanalyste Sigmund Freud montre en 1896 l’existence d’un inconscient psychique. Cette découverte premièrement absurde aux yeux de la société n’en est pas moins cruciale : tout comme Copernic (théorie de l’héliocentrisme) et Darwin (théorie de l’évolution), Freud dévalue le pouvoir de l’homme (au sein même de son psychisme) et montre là une certaine faiblesse de celui-ci. C’est en admettant cette faiblesse, ainsi qu’en découvrant ces avancées, en ce que l’homme perd la souveraineté de ses pensées, que celui-ci élève sa puissance. Par ailleurs, le navigateur Christophe Colomb découvre en 1492 l’existence d’un nouveau continent : l’Amérique.

Parallèlement à Freud, Colomb découvre l’altérité (non pas de l’homme vis-à-vis de lui-même, mais de l’homme vis-à-vis de l’autre). Cette découverte est à l’origine d’un enrichissement (d’une part matérielle, mais également) intellectuel de l’homme, une nouvelle source de connaissances et par conséquent de puissance (ex. : rectification des cartes). On peut donc affirmer que c’est en connaissant mieux le monde, et par extension en connaissant mieux notre “moi” que l’on augmente notre puissance. Autrement dit, c’est en multipliant les découvertes, en progressant (c’est-à-dire en améliorant la condition actuelle) que l’homme élève sa puissance.

Dès lors, dans quelles intentions l’homme cherche-t-il à élever sa puissance, à progresser? Y a-t-il une réelle raison pour laquelle depuis son origine l’homme est en quête du pouvoir ? Ou bien suit-il un instinct prédéfini ?

c) La quête d’émancipation

Ainsi, nous allons voir la quête d’émancipation pour définir également le développement humain. À travers la technique qui est celle de la quête d’émancipation, on peut alors acquérir une liberté. Tout d’abord la notion d’Homo faber fait référence à l’homme en tant qu’être capable de fabriquer des outils, c’est ce qu’aborde Henri Bergson dans L’évolution créatrice de 1907. Il nous montre que l’humain est moins Homo sapiens qu’Homo faber car c’est moins la sagesse ou le savoir qui le caractérise, que cette capacité à sans cesse réaliser et inventer de nouveaux outils. De plus, il dit également que l’apparition d’outils fait référence à l’apparition de l’intelligence.

Pour illustrer cette idée, c’est à la suite des découvertes de Nikola Tesla que le monde entier a pu s’émanciper. Créant entre autres un système d’hydroélectricité qui permit de transformer l’énergie de l’eau en électricité, il alimenta chaque industrie, chaque foyer et chaque rue et donc à permis à tout homme de s’émanciper du jour et de la nuit.

Transition: De ce fait par cette volonté à s’émanciper, l’homme semble ne pas avoir de limites dans sa « quête de pouvoir ». Seulement celle-ci n’est pas sans conséquences. En effet, si le progrès humain peut à première vue être bénéfique, il semble important de noter que cette émancipation laisse des traces , à différentes échelles, allant jusqu’à changer la face du monde.

II. Les conséquences du pouvoir de l’homme

a) La menace de la morale

Tout d'abord, il faut limiter la puissance humaine, car celle-ci pourrait faire entrave aux valeurs éthiques de notre société. En effet, si l'éthique est l'ensemble des valeurs qui structurent le comportement humain afin qu'il agisse consciemment, respectueusement et sans nuire à ceux qui l'entourent alors la puissance humaine semble s'y opposer. C'est notamment ce qu'exprime le philosophe allemand Jürgen Habermas dans son œuvre L'Avenir de la Nature Humaine. Dans son ouvrage, le philosophe aborde le thème d'eugénisme libéral, thème prépondérant de l'éthique puisque, l'eugénisme libéral est une notion qui signifie que des parents ont la possibilité de sélectionner un génome déterminant chez leur enfant à naitre. C'est par exemple, la possibilité de choisir de concevoir un garçon, grand, brun, aux yeux verts.

Toutefois, Habermas porte un regard très critique sur toute modification génétique de la naissance qu'il nomme « l'anthropotechnique », car selon lui, « choisir la naissance d'un enfant, c'est retirer à l'homme sa capacité à s'autodéterminer, c'est lui retirer son humanité ». On retrouve notamment cette idée dans le film Bienvenue à Gattaca réalisé par Andrew Niccol en 1997 et inspiré du roman d'Aldous Huxley, Le meilleur des mondes. Le film raconte le parcours d'un enfant du hasard (né naturellement), nommé Vincent, qui se fait passer pour un être « génétiquement valide » afin de réaliser son rêve, aller dans l'espace. Dans Bienvenue à Gattaca, les individus ne font rien en vertu de leur liberté ou de leur volonté, ils sont entièrement déterminés par leur génome. Ainsi, la puissance humaine vient ici s'opposer à l'éthique en nuisant à certains citoyens. Mais au-delà de nuire à l'éthique de notre société, la puissance humaine semble mettre en danger notre liberté.

b) La mise en danger de la liberté

En effet, comme l'écrit le philosophe et sociologue Gabriel Tarde, dans son ouvrage Les lois de l'imitation, « la technique instaurée par l'homme à tendance à neutraliser et à uniformiser nos comportements, notre manière de penser. La langue notamment s'appauvrit de plus en plus, ce qui en retour a un impact sur notre manière de penser ». Cette idée s'illustre notamment dans l'ouvrage dystopique de l'écrivain anglais George Orwell, nommé 1984. En effet, dans son roman, le personnage de Big Brother, un dictateur, incarnant le summum de la puissance humaine, instaure sa domination sur le peuple en modifiant le langage. Grâce à la création de la Novlangue conçue pour remplacer le langage traditionnel, il contrôle les masses et les esprits, et ce de plusieurs façons.

Premièrement, le langage est appauvri, il n'y a plus de distinction entre les noms et les verbes, ainsi l'action n'existe plus, contraignant la population à la passivité. De plus, on déshabille les mots de toute signification secondaire. Ainsi aucune double interprétation n'est possible, tout effort de réflexion est anéanti, menant à l'asservissement. Enfin, la novlangue élabore la création de « mots couvertures ». Les « mots couvertures » sont des mots très généraux tels que « pensée criminelle » qui recouvrent un ensemble de concepts afin de les étouffer et de les remplacer, l'objectif final étant d'appauvrir l'esprit, pour mieux le contrôler. Ainsi, comme l'explique Tarde, il faut penser à ce que l'on dit, essayer de ne dire que des choses que l'on pense et qui ont du sens pour nous, car sinon c'est la langue qui pense à notre place et donc par définition quelqu'un d'autre que nous.

c) La destruction de l’espèce humaine

Après la mise en danger de la morale et de la liberté, l’Histoire nous a montré que l’espèce humaine était capable de signer elle-même son propre arrêt de mort. Par le levier de la technique et des artéfacts qu’il crée, l’homme s’est rendu esclave de ses propres avancées. Au XXe siècle, on voit se développer de nombreux récits d’anticipation aux tournures dystopiques, qui ont pour but de mettre en garde l’Humanité contre l’oppression technologique et scientifique. En 1967, Isaac Asimov imagine une conversation entre un robot, Cutie, et son créateur, Powell, dans Les Robots. Dans cette œuvre, l’auteur illustre le projet de domination de ces êtres de métal, créé de la main de l’homme, sur l’espèce humaine. Malheureusement, ces récits d’anticipations qui relèvent de la pure fiction avaient déjà été inscrits quelques années plus tôt dans l’histoire de l’humanité : que ce soit par la Shoah ou les bombes nucléaires qui touchèrent Nagasaki et Hiroshima, l’homme avait déjà plusieurs meurtres à son actif.

Ainsi, cette destruction de l’homme par l’homme s’opère selon Gunther Anders selon trois révolutions qu’il développa dans L’Obsolescence de l’homme :
- Révolution industrielle : elle se caractérise par la supériorité ontologique de l’objet fini, produit pour une fonction déterminée qui laisse l’homme dans une indifférenciation métaphysique, laquelle engendre la honte métaphysique. Les objets ont plus de valeur que les hommes.
- Révolution de la responsabilité matérielle de l’homme : Anders remet en cause ce principe qui n’appartient qu’à l’homme et qui se définit dès à présent par la dissociation de l’action et de la décision. La proximité de la destruction de l’homme par l’homme apparait alors comme un possible perpétuel.
- Révolution de la pérennité de l’espèce humaine : Anders émet l’idée selon laquelle l’homme travaille constamment à sa disparition. Le monde moderne s’instaure et s’impose comme système, de sorte que je n’arrive plus à le changer. Ce point, pour Anders, conduit au nihilisme. Le nihilisme s’éprouve quand tout le monde est d’accord pour dire que le système est intenable, mais qu’il n’y a personne pour pouvoir le changer parce qu’il n’y en a pas d’autres. Il n’y a aucune alternative parce que la réalité sociale n’est pas politique, mais technique.

C’est par ailleurs cette dernière révolution qui pousse l’homme à être responsable des plus grands massacres du vingtième siècle en se détournant de l’universalité de la morale kantienne et de son impératif catégorique.( « Agis de telle façon que la maxime de ton action puisse être celle de l’appareil dont tu es ou tu vas être une pièce.» L’Obsolescence de l’homme, Gunther Anders (1956)) Le nihilisme se déploie comme « totalitarisme technique ». Parce que nous ne sommes plus capables d’être des hommes, nous ne sommes plus capables de produire du sens. C’est ce qui rend l’homme moderne si absent à lui-même, si conforme, si remplaçable. Ce point serait davantage une fin de l’histoire qu’un début d’une nouvelle civilisation, au sens où il dépossède l’homme de son rôle d’agent.

Transition : Avec cette remise en question du rôle que joue l’homme dans sa propre destruction, peut-on encore accepter la création de machines qui limitent l’espèce humaine à un rôle de simple spectateur ? Ne doit-elle pas considérer sa puissance comme destructrice et vouloir finalement la maîtriser pour lui assurer sa pérennité ?

III. La maîtrise de la puissance humaine

a) Le respect de la nature

La progression des techniques, cette capacité à repousser sans cesse les limites, ne finirait-elle pas par se retourner contre l’humanité elle-même si cette puissance n’est pas limitée ?La révolution industrielle, et son cortège de conséquences (augmentation de production et émission de gaz à effet de serre, artificialisation des sols, urbanisation…) ont eu des répercussions que nous connaissons bien aujourd’hui : la dégradation de l’environnement. L’humanité fait, en somme, atteindre à sa propre planète ses limites. Claude Lévi-Strauss, auteur de Tristes Tropiques, le constatait déjà dans les années 1960. Il voyait plusieurs “ravages actuels” à la civilisation occidentale mécanique : d’une part “la disparition effrayante des espèces vivantes, qu’elles soient végétales ou animales” (biodiversité actuelle) ; et d’autre part, la pollution due aux activités humaines. Lévi-Strauss appelait cette manière de vivre “une sorte de régime d'empoisonnement interne” et constatait ainsi : “devenue sa propre victime, c’est au tour de la civilisation occidentale de se sentir menacée.” En somme, maîtriser la puissance humaine permettrait alors de limiter la dynamique autodestructrice dans laquelle l’humanité semble être entrée aujourd’hui. En s'efforçant d'identifier les pratiques traditionnelles et novatrices de notre histoire, un raisonnement moral pose la question de savoir si - et comment - les facteurs moraux qui entrent en ligne de compte favorisent véritablement le bien-être des êtres humains, des autres êtres vivants ainsi que la biosphère.

En effet, l’humain a tendance à vivre le phénomène dit « écocide ». Ce nom du concept a été donné en référence à la théorie attribuant la déforestation de l'île de Pâques. Connue pour ses vestiges, les moaï, la civilisation antique de cette île a soudainement disparu dans l’histoire. Comment un peuple capable de tailler et d’ériger de colossales statues de pierre à la seule force humaine a-t-il pu disparaître si soudainement ? Dans Effondrement. Comment les sociétés décident de leur disparition ou de leur survie, Jared Diamond défend la thèse comme quoi à la suite de cette destruction irrémédiable de leur écosystème par un facteur anthropique, leur civilisation aurait sombré. Des donnés archéologiques démontrent qu’à force de chasser, de pêcher et de déboiser, les habitants ont dilapidé ces ressources sans compter et sans se soucier de leur renouvellement. Tandis que les habitants se sont multipliés et ont mobilisé leur énergie dans la construction de ces moaï, cette île ne devint plus que déserte, dépourvue d’être vivant et d’arbre. Ce syndrome de l’île de Pâques sonne évidemment comme un avertissement pour notre propre civilisation et nous permet de comprendre l’importance du respect de la nature et de cette responsabilité que nous avons envers la biosphère, qui concerne les interrelations de toutes les formes de vie et la protection de la biodiversité. Ce principe souligne la condition de santé nécessaire de l’écosystème pour nos besoins présents et futurs, ainsi que l’importance de la maîtrise de nos actions.

b) L’importance de l’encadrement éthique

Ainsi, comment ce principe de responsabilité nous fait-il prendre conscience de l’importance de notre engagement dans la survie de notre espèce ? Face à notre comportement autodestructeur, un encadrement éthique est nécessaire. Faire appel à l'adhésion des personnes par les valeurs relève de l’exigence pour choisir la meilleure chose à faire dans les circonstances actuelles. L'intérêt de l'éthique réside dans son objectif qui est de développer chez les gens leur capacité à prendre par eux-mêmes des décisions responsables. Mais ce n’est pas suffisant. Il faut faire également appel à la déontologie pour mieux limiter nos actions et fixer ce qui est tolérable de ce qui ne l’ait plus, à travers un ensemble des règles imposant des consignes et des obligations quant à la conduite de notre peuple. C’est dans cette résolution que l’Agenda 2030 a vu le jour. Ce programme universel porte l’ambition de transformer notre monde en éradiquant la pauvreté et les inégalités en assurant sa transition écologique et solidaire à l’horizon 2030. 17 objectifs de développement durable couvrent l’intégralité des enjeux de développement et mobilisent l’ensemble des acteurs à mettre en œuvre l’intégralité de cet agenda ainsi que son peuple.

Mais pourquoi devons-nous en arriver jusqu’à cet extrême. Longtemps la nature fut le cadre immuable, protecteur ou menaçant, d'une vie humaine ressentie comme essentiellement précaire. Pour autant le pouvoir technologique a rendu la nature “altérable à volonté”, puis en a fait, en même temps, « un être fragile et menacé”. C’est à se demander pourquoi l’homme existe. Quels sont sa place et son rôle dans la nature. Sur ce questionnement et cette réflexion, Hans Jonas reconsidère les rapports entre l’humanité et son environnement dans son livre Le Principe responsabilité. Pour Jonas, l’humain est confronté à une technique destructrice qui endommagerait le monde et l’humanité. Ainsi il est important de retrouver une éthique de responsabilité et de transformer en profondeur les modes d’actions et de vie des hommes. Préserver sa propre vie sur Terre, mais surtout celle des générations à venir est donc la tâche primordiale que l’homme doit impérativement réaliser.

c) La force de la politique

Pour le philosophe anglais du 17e siècle Thomas Hobbes, qui est empiriste et témoin des troubles politiques et religieux de son époque, “l’homme est un loup pour l’homme” (Du citoyen 1647). Ainsi, il défend que l’homme est une menace pour lui-même, mais aussi que l’homme soit un dieu pour l’homme : c’est-à-dire que l’homme est à la fois une menace et une solution. Pour pallier cet état de nature, cet état de guerre permanent, Hobbes propose dans le Léviathan (1651) un contrat de soumission soutenant que la paix ne peut être produite que s’il existe une obéissance juste et légitime envers un souverain capable de châtier ceux qui menacent cette paix.

Ainsi, l’organisation des institutions politiques paraît être un moyen de limiter la puissance humaine et ce grâce à un contrat de soumission qui suppose une décision commune d’abandonner son droit de nature pour le transférer à un tiers, c’est-à-dire à un souverain, à un État. Ainsi, chacun autorise l’État à agir en son nom pour défendre la paix. En ce sens, la force de la politique semble résider dans le fait qu’elle permet de maîtriser la puissance humaine afin de garantir la paix. Cependant, lorsque les individus acceptent de confier leur volonté à une force supérieure en échange de sécurité, cela semble implicitement supposer l’usage de possible de violence afin de soumettre ceux qui mettraient cette sécurité en danger. Dans le Savant et le Politique (1917), Max Weber forge en effet le concept de politique de violence légitime : l’État serait cette institution détenant le monopole de l’usage de la violence. Dès lors, le bien-fondé de la politique pour limiter la puissance humaine semble remis en question.

Conclusion

Les découvertes ont donc toujours été vectrices d'une plus grande puissance pour l'homme, par le développement de ses connaissances, par ses inventions et ses outils. Sans être bonnes ou mauvaises en soi, elles ont toujours été porteuses d'un progrès, d'une plus grande puissance, et ce dans tous les sens du terme: physique, militaire, mais aussi technique, médicale, et bien sûr productive. Mais cette puissance peut inquiéter, tant elle peut bouleverser l'existence même de l'homme, en le dépassant, en l'aliénant, en le rendant esclave de ses propres inventions. Ce qui est puissant peut construire, mais tout aussi bien détruire, et ce en quelques instants, à l'image de la puissance nucléaire.

Aussi la puissance humaine est toujours dépendante de son environnement et des ressources qu'il offre, qui elles ne sont pas infinies. Dès lors il est nécessaire de mesurer l'impact des découvertes, d'autant que la technique n'a jamais été aussi présente dans notre quotidien, et de vouloir maîtriser cette puissance: qu'elle reste désirable pour le plus grand nombre et dans un horizon de temps le plus large possible. La politique et l'État ont dès lors tout leur rôle à jouer pour garantir une puissance au servir du commun.