Peut-on parvenir à d'authentiques certitudes ?

Dissertation entièrement rédigée. Note obtenue : 17/20.

Dernière mise à jour : 31/08/2021 • Proposé par: Luvadea (élève)

Pendant plus d'un millénaire, on a accepté le système géocentriste de Ptolémée comme le véritable système astronomique expliquant le mouvement des astres. En effet, la méthode d'observation qui avait servi à son élaboration montrait une évidence difficilement réfutable à l'époque : l'univers tournerait autour de la Terre. Le géocentrisme perdura ainsi, jusqu'à ce que la révolution copernicienne amorcée en 1543 ose remettre en cause par la théorie de l'héliocentrisme ce que l'on avait admis pour certitude immuable et authentique. Ainsi ce qui paraît certain n'est pas nécessairement vrai. Cette considération a amené à définir de nouvelles méthodes pour connaître le réel. Avec la théorie de l'héliocentrisme, il n'est pas seulement question de l'effondrement d'une certitude, mais il s'agit aussi d'introduire un nouveau rapport entre l'homme et le réel. L'homme n'est plus réduit être simple spectateur des phénomènes, il lui incombe la nécessité de les soumettre à l'expérience pour les comprendre et les expliquer. À un rapport statique se substitue ainsi un rapport flexible au réel. Si l'homme étudie donc désormais les phénomènes lorsqu'ils sont en interaction avec le réel, c'est dès lors un monde en constant mouvement que l'homme étudie désormais. Comment peut-il alors parvenir à être certain de ce qu'il sait d'un monde qui s'avère être en permanente évolution ? Ses certitudes peuvent-elles constituer une vérité immuable ? Tout d'abord, il s'agit de se demander en quoi la certitude peut-elle avoir une valeur de vérité, avant de considérer deuxièmement sa relativité. Enfin, ce serait peut-être le caractère relatif qui pourrait faire de sa remise en cause un progrès vers le vrai.

I. La certitude, l'aptitude pour discerner ce qui semble vraie

Tout d'abord, quel est le rapport entre la certitude et la vérité ?

Le sujet amène en premier lieu à s'interroger sur la valeur des certitudes, et notamment sur le fait de savoir si leur nature les rend aptes à être authentiques. Par authentique, on entend que leur exactitude, leur fondement soient incontestables. Dans son sens philosophique, la certitude renvoie à un état d'esprit prédisposé à etre assuré de détenir la vérité et les critères qui garantissent qu'il s'agit bien de la vérité, et ce de telle manière que le doute en est exclu. Le fait que la certitude repose sur une assurance souligne donc son caractère subjectif : elle est la conviction qu'une chose est vraie. Les conclusions que l'on tire après avoir jugé une démonstration ou un expérience peuvent nous amener à être convaincus que ces dernières soient vraies, et donc à en avoir la certitude. Celle-ci reposerait donc sur la croyance et le jugement. Or ces derniers sont par définition contestables, comment alors peut-on garantir d'une certitude qu'elle soit authentique, c'est-à-dire incontestablement vraie ?

La certitude se révèle être alors la croyance en la vérité. En ce sens, si cette croyance rassemble en plus d'une certitude partagée par tous, une conviction individuelle, il s'agit alors de la science, comme l'a souligné Kant. Vue dans son sens large comme l'ensemble des savoirs, elle est la discipline qui s'efforce de connaître, de comprendre et d'expliquer le réel par le moyen de la raison. Celle-ci, outil essentiel de la connaissance, synthétise l'interprétation des sens et les connaissances à sa disposition pour connaître, la certitude s'applique donc comme une appréciation du résultat du raisonnement. La certitude manifeste donc l'aptitude de l'homme à pouvoir discerner ce qui lui semble vrai.

II. Les certitudes demeurent néanmoins des vérités subordonnées

Si l'homme est capable d'intérioriser le vrai sous forme de certitudes, ces dernières gardent-elles la valeur absolue de la vérité ?

Le problème réside dans la manière dont sont intériorisés les éléments du vrai. Ce problème tient principalement du fait de la subjectivité de l'homme. "L'homme est mesure de toute chose" énonce Protagoras ; en effet, l'homme ne peut intérioriser par ses sens, sa personnalité, ses dispositions, qu'une traduction d'une vérité, au final plus ou moins déformée. Ce que l'homme intériorise alors n'est pas la vérité, mais sa vérité, c'est-à-dire ses certitudes. C'est ainsi qu'en témoigne la diversité des interprétations d'un phénomène dans le domaine des sciences humaines. Nul ne détient la vérité mais chacun essaie d'en rendre compte. Il ne s'agit plus alors d'une vérité absolue, mais de vérités relatives, conformément au relativisme.

De ce fait, on croit savoir plus que l'on ne sait. En effet, dans son usage pratique, la raison a besoin de recourir à ce qui est d'ordre métaphysique pour combler le manque de connaissances vis à vis d'un objet d'étude. L'homme est donc obligé de croire en une explication de son raisonnement pour connaître et comprendre un phénomène, en dépit de ce que l'expérience ne lui montre pas de manière évidente, telle que l'origine. C'est de cette manière qu'il construit les hypothèses, "idées préconçues" qui doivent guider l'individu dans son investigation vers le vrai. La croyance se substitue ainsi au savoir, précise Kant, puisque l'homme se base sur la croyance en ses certitudes pour progresser. En tant qu'hypothèses, les certitudes demeurent des vérités subordonnées à la condition de l'expérimentation.

III. Connaître le vrai demande donc de remettre en cause en permanence

Comment l'homme peut-il espérer connaître le vrai s'il n'a donc qu'à sa disposition les vérités relatives de sa certitude ?

Ce serait justement l'aspect relatif de ses certitudes qui pourrait aider l'homme à se rapprocher du vrai. Si dans sa définition la certitude exclue le doute, son caractère relatif justifie pourtant la légitimité de douter. Il ne s'agit pas alors de douter à la manière des sceptiques dans le seul but de douter, mais d'adopter un doute méthodologique que définit Descartes. En doutant de ses certitudes, il convient d'en neutraliser les erreurs et les plus mal fondées par le raisonnement de manière à en reconstruire de nouvelles, plus proches de la vérité. Ainsi Rostand affirme : "Pour frayer un sentier nouveau, il faut être capable de s'égarer". C'est donc parce qu'elle est contestable que la certitude doit amener à douter pour poursuivre le vrai.

Se borner à ses certitudes relèvent ainsi de l'erreur. En effet, les certitudes étant du même ordre que les hypothèses, à la manière de ces dernières, elles doivent être constamment vérifiées pour être valides. Comme l'a montré l'Histoire, la science s'est construite sur la remise en cause permanente de ses théories et hypothèses par l'expérimentation, seule méthode authentique. De même, les idées conçues doivent donc soulever leurs inexactitudes et leurs préjugés, c'est-à-dire être prêtes à être critiquées donc à savoir évoluer, puisque c'est par cette seule manière qu'elles pourront tendre vers une authentique vérité.

Conclusion

À la question de savoir si nos certitudes pouvaient constituer une vérité, il a donc été question de s'interroger sur la manière dont l'homme peut parvenir à connaître le vrai. On a vu tout d'abord que les certitudes constituaient chez l'homme une vérité qui lui est propre et en laquelle il croit ; mais que cependant, cette croyance en la vérité demeurait un savoir relatif et hypothétique. C'est donc en osant remettre en cause ce qu'il tient pour vrai que l'homme peut espérer déceler les erreurs de son jugement, et ainsi de rapprocher de la vérité.