D'Holbach, Le Système de la nature: "On a cru que l’homme était libre"

Commentaire type bac.

Dernière mise à jour : 01/01/2024 • Proposé par: Miloud2006 (élève)

Texte étudié

On a cru que l’homme était libre, parce qu’on s’est imaginé que son âme pouvait à volonté se rappeler des idées, qui suffisent quelquefois pour mettre un frein à ses désirs les plus emportés. C’est ainsi que l’idée d’un mal éloigné nous empêche quelquefois de nous livrer à un bien actuel et présent. C’est ainsi qu’un souvenir […] anéantit […] l’action des objets réels qui agissent sur notre volonté. Mais nous ne sommes point les maîtres de nous rappeler à volonté nos idées ; leur association est indépendante de nous ; elles se sont à notre insu et malgré nous arrangées dans notre cerveau; elles y ont fait une impression plus ou moins profonde ; notre mémoire dépend elle-même de notre organisation, sa fidélité dépend de l’état habituel ou momentané dans lequel nous nous trouvons ; et lorsque notre volonté est fortement déterminée par quelque objet ou idée qui excitent en nous une passion très vive, les objets ou les idées qui pourraient nous arrêter, disparaissent de notre esprit. […] L’homme n’est donc libre dans aucun instant de sa vie ; il est nécessairement guidé à chaque pas par les avantages réels ou fictifs qu’il attache aux objets qui excitent ses passions. Ces passions sont nécessaires dans un être qui tend sans cesse vers le bonheur; leur énergie est nécessaire, puis qu’elle dépend de leur tempérament ; leur tempérament est nécessaire, puisqu’il dépend des éléments physiques qui entrent dans sa composition : les modifications de ce tempérament sont nécessaires, puisqu’elles sont des suites infaillibles et inévitables de la façon dont les êtres physiques et moraux agissent sans cesse sur nous. Malgré des preuves si claires de la non liberté de l’homme, on insistera, peut-être, encore, et l’on nous dira que si l’on propose à quelqu’un de remuer ou de ne pas remuer la main, actions du nombre de celles que l’on nomme indifférentes, il parait évidemment le maître de choisir, ce qui prouve qu’il est libre. Je réponds que dans cet exemple l’homme pour quelque action qu’il se détermine ne prouvera point sa liberté ; le désir de montrer sa liberté, excité par la dispute, deviendra pour lors un motif nécessaire qui décidera sa volonté pour l’un ou l’autre de ces mouvements ; ce qui lui fait prendre le change, ou ce qui lui persuade qu’il est libre dans cet instant, c’est qu’il ne démêle point le vrai motif qui le fait agir, c’est le désir de me convaincre.

D'Holbach, Le Système de la nature

Le passage que nous allons étudier provient de l’ouvrage philosophique Le Système de la nature écrit par le philosophe franco-allemand Paul Henry Thiry, Baron d’Holbach, en 1770. Ce dernier est notamment célèbre, car il fait partie des collaborateurs qui ont contribué à L’Encyclopédie. Dans le cadre de notre parcours en philosophie, nous nous penchons aujourd'hui sur un texte qui remet en question l'une des notions les plus fondamentales de la philosophie et de la vie humaine : la liberté. Holbach dans cet ouvrage pense que l’homme n’est pas libre en remettant en cause la croyance commune en la liberté de notre volonté, du libre arbitre.

Pouvons-nous croire que l’homme est libre et qu’il dispose du libre arbitre ? Sommes-nous vraiment maîtres de nos choix et de nos actes, ou sommes-nous soumis à des forces invisibles qui déterminent notre volonté ? Cette réflexion sur la liberté humaine est au cœur de la philosophie depuis des siècles, et elle reste une question cruciale pour notre compréhension de nous-mêmes. Dans ce commentaire, nous allons analyser le texte en examinant les arguments de l'auteur, les implications de ses idées et les débats philosophiques qu'il suscite Pour cela nous verrons d’abord des lignes 1 à 13, l’idée commune de liberté ainsi que sur les limites du libre arbitre selon Holbach. Après avoir étudié la prédominance de la passion et du déterminisme des lignes 13 à 21, nous verrons enfin la réfutation de l’apparente liberté.

I. Les limites du libre arbitre

Tout d'abord, d'Holbach commence par formuler une opinion commune, c'est-à-dire ce que diraient la plupart des gens sans y avoir particulièrement réfléchi. On retrouve cela à travers le fait qu'il dit "on a cru que l'homme était libre" et non "j'ai cru que". En effet, dans ce texte, Holbach remet en question l'idée traditionnelle de la liberté humaine, l'illusion de liberté dans laquelle nous sommes. Ensuite, Holbach décide d'évoquer la raison pour laquelle l'homme s'attache à cette illusion. Il expose alors toujours derrière ce "on" les arguments des partisans. Selon lui, l'homme a la conviction qu'il est libre parce qu'il peut délibérément se remémorer des idées qui peuvent tempérer ses désirs impulsifs. Ici, la question n'est pas le fait de se remémorer ces idées, mais plutôt que l'homme croit qu'il peut le faire à volonté, c'est-à-dire quand il le désire. En effet, Holbach nous présente l'homme comme étant persuadé d'être doté du libre arbitre, c'

Accédez à la suite de ce contenu
Obtenez un accès immédiat à tous nos contenus premium.