Peut-on concilier désir et liberté ?

Dissertation entièrement rédigée en deux parties :
I. Comment concilier le désir et la liberté qui est lucidité, réalisme ?
II. Comment dépasser ces antagonismes ?

Dernière mise à jour : 15/09/2021 • Proposé par: mathildev (élève)

Introduction

Il est difficile de savoir entre le désir et la liberté ce qui est premier ou nécessaire à l’existence humaine tant les deux sont des données fondamentales pour comprendre l’homme. Selon Spinoza, l'homme est défini non par la raison mais par le désir : « Le désir est l'essence même de l'homme. » Quant à la liberté, elle n'est qu'une illusion issue d'une fausse conception de l'acte volontaire : c'est l'ignorance des causes qui nous déterminent qui engendre cette méconnaissance. Comment concilier le désir et la liberté qui est lucidité, réalisme ? Comment dépasser ces antagonismes ?

I. Comment concilier le désir et la liberté qui est lucidité, réalisme ?

Selon l’Ethique de Spinoza : l'homme n'est pas un être de connaissance, mais un être de désir. Spinoza l'affirme à plusieurs reprises: « L'essence de l'homme est le désir. » Le fondement (et le sens) de ce désir est à la fois naturel et actif : c’est l’effort pour persévérer dans l’être. Spinoza renverse encore une fois l'ordre des termes : ce n'est pas pour connaître que l'homme désire (comme chez Platon) ; c'est pour étendre son désir que l'homme s'efforce d'imaginer ou de connaître. Le désir n'est pas pour Spinoza le domaine inférieur de la sensibilité, qui serait source du mal et de l'esclavage et qu'il conviendrait de réprimer par la raison et la morale. Cette perspective platonicienne et kantienne est à placer à l’opposé du spinozisme. Ici, au contraire, le désir est le mouvement existentiel du corps et de l'esprit ; c'est un mouvement unique. Les passions et les sentiments, ou plutôt les affects ne sont rien d'autre que la conscience des transformations du corps, l'idée des affections du corps. Mais comme le pouvoir qu'il manifeste peut aller en s'accroissant ou en diminuant, l'homme peut vivre la joie ou au contraire la tristesse, bien qu'il poursuive essentiellement toujours la réalisation et la perpétuation de son désir, c'est-à-dire la joie. De ces deux « passions » fondamentales découleront tous les affects humains : amour, générosité, courage, ou bien, au contraire, envie, haine, jalousie, ambition. C'est ici que peut enfin se situer le problème de la liberté. L'esclavage, la servitude comme dit Spinoza, n'est pas le fait du désir, mais de la passion. Or la passion n'est pas définie par le corps et la sensibilité, mais par le fait qu’elle se base sur des règles reçues de l’extérieur et par l'illusion ; un affect est une passion s'il implique l'imagination, l'erreur, la connaissance partielle et confuse des causes, la dépendance à l'égard de causes qui ne sont pas en nous. C'est la conscience de l'ordre véritable des choses qui constituera la liberté : « Nous ne désirons pas une chose parce qu'elle est bonne, mais au contraire c'est parce que nous la désirons que nous la disons bonne » d’après Spinoza dans l’Ethique.

La servitude, c'est le désir ignorant et imaginaire, livré à lui-même dans sa spontanéité et s'enchaînant à des déterminations extérieures à lui-même. Dans l'ordre psychologique, le désir s'enchaîne aux dialectiques de l'imaginaire (identification et imitation des passions ; ambivalence, contradictions ; renversement des passions dans les relations de l'amour et de la haine). Cette servitude n'est donc pas définie par le seul désir, mais par ses productions imaginaires. Il appartient à la philosophie après avoir établi la concorde et l'amitié (et non pas seulement la sécurité), de travailler à la libération intérieure et à l'instauration du « bien véritable » qui est joie souveraine et parfaite. Spontanément, le désir produit donc dans l'ordre politique la convoitise, la concurrence et la guerre (sans qu'il y ait là aucun « mal ») et dans l'ordre individuel la passion, l'angoisse et la dépendance. En un mot, le désir produit d'abord l'impuissance de fait et la destruction de soi : le contraire de ce qu'il visait.
 

II. Comment dépasser ces antagonismes ?

Qu'il faille rendre ses droits au besoin pour comprendre d'où le désir tire son énergie, c'est une évidence dont Freud n'a cessé de tirer les implications. Si le désir n'est défini qu'à partir d'un manque éprouvé par le sujet du besoin, comment pourrait-il se constituer autrement que négativement ? Comment pourrions-nous en signifier l'objet ? La question surgit ainsi de savoir si le désir croît en raison de l'aptitude à ressentir la privation ou en proportion de l'évanescence et de l'absence de réalité effective propre à son objet. Il faut revenir à ce constat: les besoins non satisfaits s'oublient, mais il est des désirs non réalisés qui subsistent indestructibles. Entre les premiers et les seconds sont nées d'inconcevables possibilités d'oubli et de mémoire, de don et de tromperie, de jouissance et d'horreur.

  Ce n'est pas parce que le raisonnement tire une conclusion à partir de principes qu'il cesse d'être pratique et bascule du côté de la théorie ou de la spéculation ; le véritable raisonnement pratique a toujours pour point de départ quelque chose de désiré ; il classe, ordonne, les caractères de désirabilité qui s'attachent aux échelons successifs de l'action. En faisant ainsi accéder ses désirs au langage par les moyens de « caractères de désirabilité », le sujet qui s’exprime place ses désirs eux-mêmes dans un enchaînement de moyens et de fins. C'est là le premier degré de la liberté : être capable, non seulement de « souffrir », de « subir » ses désirs, mais de les porter au langage en énonçant le caractère de désirabilité qui leur est propre et en soumettant au calcul des moyens et des fins l'enchaînement de l'action. Le désir n'est plus alors une simple « impression », il est mis à distance par rapport à l'ensemble des voies et des moyens, des obstacles et des instruments que l'action doit traverser pour « remplir » l'intention. Aristote considère une série de cercles concentriques dans lesquels nous plaçons notre action : le cercle le plus vaste est celui des actions que nous faisons volontiers ou de plein gré ; ce sont celles que nous faisons spontanément, sans être contraints, ni intérieurement ni extérieurement ; parmi ces actions, il y a celles qui sont simplement souhaitées et dont l'exécution ne dépend pas de nous mais de quelqu'un d'autre ou du hasard et celles qu'il dépend de nous de faire ou de ne pas faire. C'est parmi celles-ci que se découpent les actions qu'on peut dire véritablement préférées. C'est donc bien dans l'articulation des moyens par rapport aux fins que consistent les actions dont on peut dire qu'elles sont, par excellence, notre œuvre. Chez un être comme l'homme, dont la volonté est affectée par le désir, la volonté subjective est à la croisée du devoir et du désir ; l'action concrète présente alors les traits que le langage ordinaire lui reconnaît. 

Conclusion


  
Le désir, loin d’être un obstacle à la liberté constitue une donnée fondamentale de la vie humaine. Il faudrait plutôt composer avec ce dernier, connaître nos désirs pour mieux nous en libérer, pour être libre et agir en connaissance de cause. Le meilleur moyen d’être libre avec ses désirs serait de les connaître, la psychanalyse est un bon moyen tout comme l’introspection.