Faut-il vivre avec son temps ?

Fait par un élève, corrigé complet. Note obtenue : 15/20.

Dernière mise à jour : 15/09/2021 • Proposé par: miaw13 (élève)

L’expression « il faut vivre avec son temps » semble être issue d’une certaine sagesse populaire et est utilisée généralement pour critiquer de façon péjorative une personne semblant demeurer en marge de la société. Et également pour rappeler à l’ordre et adresser un reproche à un individu étant en dehors des normes d’un groupe et qui se singularise en vivant selon ses propres règles, celles-ci pouvant paraître démodées et appartenir à un autre âge ou encore être trop novatrices. Ainsi cette expression sous-entend une obligation de s’adapter et de suivre la pensée et le mode de vie propre à son époque sans nous laisser la liberté de choisir : en tant qu’individus faisant partie intégrante de notre temps nous devons par conséquent nous assumer en tant que tel et vivre en fonction de cela. Mais faut-il nécessairement vivre avec son temps ? Ce « décret » soulève bien des interrogations : Pourquoi vivre avec son temps, quels en seraient les avantages et l’enjeu ? Quels sont les risques qu’implique une telle contrainte ? Ne vaut-il pas mieux essayer de prendre du recul avec cette obligation ?

I. Vivre avec son temps permet de s'adapter aux réalités historiques, scientifiques et culturelles



Pour commencer nous allons étudier les raisons qui pousseraient à vivre avec son temps. En effet si l’expression « il faut vivre avec son temps » existe c’est qu’elle a une raison d’être et doit s’expliquer par des motivations véritables qui justifieraient son emploi.

Il est important pour commencer de tenir compte des changements brutaux et fondateurs comme la Révolution française qui mit fin à la monarchie et qui eut un impact à long terme pour installer au fil des ans la république. Une personne de notre époque ne peut ignorer cet événement historique et est obligée de s’en accommoder et de vivre en y prenant compte. Ainsi il est inconcevable actuellement qu’un individu ait des esclaves car cela appartient à un passé révolu, personne ne pouvant faire abstraction de l’abolition de l’esclavage. Il est donc nécessaire de vivre dans le présent en l’adaptant en fonction du passé, en tenant compte de l’Histoire. Là-dessus je ne peux émettre la moindre contestation, le passé est résolu donc, inchangeable. Ainsi même si certains faits peuvent paraître monstrueux et durs à admettre comme le génocide des juifs pendant la Seconde Guerre mondiale, il n’en demeure pas moins qu’ils appartiennent à notre savoir historique, et la connaissance de tels événements est nécessaire à la compréhension et l’organisation du présent. Les ignorer serait juste une manière de s’aveugler et de refuser de voir la réalité telle qu’elle est. Ainsi il est fondamental d’accepter les événements passés comme la collaboration sous la France de Vichy car même si c’est une vérité qui dérange elle nous oblige à vivre avec notre temps puisque nous ne pouvons pas faire abstraction de ce fait qui fait parti de notre connaissance.

Ce qu’il me vient ensuite à l’esprit c’est l’évolution en continu au fil des temps des esprits par des découvertes scientifiques. Ainsi une personne vivant au XXIème siècle est obligée d’admettre que la Terre est ronde et tourne autour du soleil, ignorer une telle connaissance serait une preuve d’enfermement dans le passé et un refus d’accepter la réalité. Donc il faut savoir reconnaître certaines valeurs sûres prouvées par démonstration scientifique, en accepter les conséquences et évoluer en fonction de cela. En cas de déni de ces nouveaux éléments l’individu sombrerait dans la superstition et interprèterait un séisme comme la colère divine puisqu’il aura, dans son esprit réfuté les découvertes scientifiques concernant la tectonique des plaques. Ainsi une des raisons de vivre avec son temps serait donc de s’adapter aux savoirs qui doivent former une base de donnée fiable pour tout individu afin que celui-ci ne demeure pas dans l’ignorance en conservant des idées fausses. Mais cela m’amène à m’interroger sur le fait qu’un savoir même vrai est-il toujours bon à connaître, et une nouvelle découverte nécessairement bonne à assimiler ? La découverte de la théorie sur la relativité restreinte par Albert Einstein par exemple appartient désormais à nos acquis mais sa connaissance n’est-elle pas néfaste et ne met-elle pas en péril notre société puisqu’elle a permis la création de la bombe nucléaire.

Comme autre motif de vivre avec son temps il me semble également qu’il y a les diverses inventions et avancées quelles soient d’ordre médical, ou technique qui contribuent à l’amélioration des conditions d’existence. En effet puisque les connaissances dans ces domaines ont évolué, l’être humain aurait-il raison de les rejeter. Comme dans le cas d’une personne qui refuserait de se vacciner à notre époque en mettant ainsi sa vie en péril en plus de celle de la communauté dans le cas de maladies contagieuses. De même serait-il justifié qu’un individu refusant les nouvelles techniques préfère labourer son champ lui-même, sans aide matérielle ce qui à long terme provoquerait des dégâts importants sur sa santé. Il semble donc nécessaire de suivre l’évolution des techniques dans son propre intérêt mais tout cela me pousse à me demander si, outre le risque d’avoir une société matérialiste dans laquelle des outils ne répondant pas à un besoin vital immédiat et n’apportant aucune amélioration des conditions d’existences comme la télévision deviendrait un produit nécessaire, toute évolution technique est utile à acquérir comme le travail à la chaîne qui traduisait une énorme avancée technique à l’époque de son invention réduisit l’homme à l’état de machine comme le dénonce le film de Charles Chaplin « Les temps modernes ».

Le dernier aspect qui me vient à l’esprit est l’importance de suivre la transformation des mœurs pour ne pas être réactionnaire et accepter l’évolution de notre société. En effet, il semble impensable à notre époque dans la plupart des pays développés qu’une femme soit soumise à son mari, alors que s’était considéré comme normal il y a peu de temps de cela, le statut de la femme ayant été reconnu que très récemment, en France par exemple, la femme n’a eut le droit de vote qu’en 1945 ce que nous trouverions aberrant aujourd’hui était anodin à une autre époque car pas encore installé dans les moeurs. Il faut donc savoir vivre avec son temps pour ne pas s’enfermer dans des traditions dépassées. Il faut aussi suivre l’évolution des mentalités pour avoir un regard actuel sur le monde. Ainsi cela fait très peu de temps que l’homosexualité est reconnue et tolérée dans un grand nombre d’états ce qui était loin d’être le cas il y a quelques années ou encore actuellement dans certaines régions du globe. Or un individu ne s’étant pas adapter à l’évolution des états d’esprit serait resté prisonnier d’une vision périmée sur l’homosexualité. Mais cela m’invite à me questionner sur le problème du conformisme, ainsi serait-il sensé que sous prétexte qu’il faut évolué en même temps que la mentalité des gens nous soyons obligée de nous ranger sur cet état d’esprit ce qui reviendrait à aseptiser la pensée ce que nous étudierons plus en détail dans la partie suivante.

II. Mais vivre avec son temps peut nous enfermer dans le conformisme

Ensuite nous allons voir que l’obligation de vivre avec son temps comporte une part de risque et peut avoir de lourdes conséquences entraînant le conformisme et l’emprisonnement dans le présent.

La première des conséquences qu’entraîne l’obligation de vivre avec son temps est sans aucun doute le conformisme déjà mentionné précédemment. En effet il se pose le problème d’uniformisation des esprits voulu notamment par les effets de mode relié par la publicité qui incite les gens à être dans l’air du temps en achetant tel ou tel produit mis en avant par un phénomène de mode. Par le conformisme les gens se sentent obligés de vivre avec leur temps ce qui constitue le risque de se fondre dans la masse en renonçant à toute individualité ce que l’on peut voir par exemple avec les médias qui peuvent imposer aux gens de s’intéresser à certains éléments actuels de la société en les mettant en valeur comme pour le cas du sport à notre époque, notamment le football et plus récemment le rugby. Cette mise en avant fait désormais partie de notre système et oblige les gens de toutes générations à s’y intéresser car il est impossible d’y échapper à cause de la surmédiatisation à moins de vivre coupé du monde. Vivre avec son temps peu donc se révélé risqué car l’esprit est conditionné par les centres d’intérêt de son époque. Ce même conformisme vaut aussi pour les modes de vie ce qui empêche d’évoluer. Ainsi une personne vivant sans utiliser de moyens de transports pour éviter de polluer sera aussitôt pointée du doigt, et de surcroît considérée comme ridicule, en ceci qu’elle se marginalise par rapport au mode vie de son temps et refuse de se formater sur les autres. Cela à lieu car le véhicule est devenu une nécessité par conformisme puisque les gens fondent leur existence en fonction de cet élément, et que le monde ne peut désormais plus se passer des moyens de transport car il c’est créé une situation de dépendance. Cela me pousse à m’interroger sur le risque que cela constituerait si le conformisme dut à notre époque était utilisé par un homme politique mal intentionné qui prétextera que tel ou tel projet est nécessaire par rapport à la période où nous vivons sans quoi nous risquerons d’être dépassé et qui le justifiera par l’obligation de s’adapter à notre temps. En transformant ce projet en nécessité et en jouant sur le conformisme toute résistance est éliminée puisque le projet ainsi présenté semble ne souffrir d’aucun délai et répondre à une exigence voulue par notre époque auquel il faut se conformer.

Hormis le risque de conformisme l’obligation de vivre avec son temps entraîne une autre conséquence qui est l’enchaînement au présent sans la possibilité d’évoluer. En effet s’il est nécessaire de vivre avec son temps il devient inutile d’espérer la moindre évolution. Vivre avec son temps empêcherait donc la création de nouveautés puisqu’il faut se limiter à ce qui existe déjà. Ainsi si nous prenons l’exemple d’un musicien, celui-ci devrait se contenter de reproduire ce qui existe déjà et se borner à appliquer des règles bien définis d’un genre précis en cours à notre époque. Je ne peux m’empêcher de penser que l’expression « il faut vivre avec son temps » est totalement inepte dans ce cas là puisque l’Histoire nous montre que tout évolue continuellement : l’art évolue, les langues évoluent... En plus d’empêcher la création et donc une évolution future cela impliquerait aussi de se passer d’éléments passés qui ne se sont plus d’usage à notre époque et qui appartiennent à un autre âge. Ainsi l’obligation de vivre avec son temps inclurait qu’il ne faut plus s’intéresser aux films muets par exemple. Mais en allant plus loin que la limite culturelle qu’impose l’obligation de vivre avec son temps il y a également l’enfermement de la pensée dans le présent. En effet, si contrainte de vivre avec son temps il y a, la pensée ne peut pas évoluer et va se réduire à adopter les idées de notre époque. Ainsi une personne ayant des idéaux politiques différents des partis déjà existant devra se restreindre à renoncer à dire ses idées et s’aligner sur un des partis déjà existant car sa pensée est non conforme à la période où il vit. Or Kant démontre dans Qu’est-ce que s’orienter dans la pensée ? dans le passage relatif à la liberté d’expression qu’empêcher de s’exprimer équivaut à empêcher de penser. Je ne peux m’empêcher de constater que vivre obligatoirement avec son temps serait une contrainte terrible à la création et un bâillonnement du libre arbitre qui n’a le droit d’exprimer uniquement ce qu’une période donnée autorise ce que l’on peut illustrer par la répression sanglante des étudiants chinois manifestant à la place Tian'anmen pour exprimer leur mécontentement vis-à-vis de la corruption du régime communiste installé en Chine, mouvement gênant puisqu’il faisait savoir ses idées.

III. Il faut accepter son temps tout en gardant son libre arbitre

Pour finir nous allons étudier qu’il vaut mieux savoir prendre du recul avec l’expression « il faut savoir vivre avec son temps » pour pouvoir être libre et évoluer individuellement.

Nous avons donc constaté dans les parties précédentes que de nombreuses raisons expliquaient la nécessité de vivre avec son temps et qu’il faut obligatoirement tenir compte du passé pour pouvoir vivre dans le présent mais nous avons vu ensuite que l’obligation de vivre avec son temps enchaînait l’individu dans le présent se traduisant par l’absence de développement de l’esprit et par une uniformité de la pensée.

Nous faisons donc face à un paradoxe, nous sommes obligés de vivre avec notre temps, mais cette obligation est terriblement dangereuse et remet en cause le libre arbitre. Qu’elle est donc la solution ? Selon moi il faut prendre du recul par rapport à l’obligation de vivre avec son temps quand il s’agit de limiter la pensée, cette expression doit au contraire servir à illuminer les individus en les poussant à vivre avec une mémoire qui se souvienne des événements passés et des savoirs acquis pour pouvoir construire le présent. Il ne faut donc pas vivre prisonnier de l’instant mais avec une mémoire et la capacité d’évoluer car avant de savoir ce que l’on désire changer il faut connaître ses origines et construire l’avenir en fonction du passé afin d’évité de faire les mêmes erreurs, c’est ainsi qu’après la Seconde Guerre mondiale des états décidèrent de se rapprocher en formant la Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier pour éviter de reproduire les erreurs passées après deux grands conflits majeurs.

Du point de vue individuel, une personne doit avoir cette même mémoire pour pouvoir connaître une évolution et elle doit refuser de voir ses pensées bâillonnées et son esprit livré au conformisme, elle doit au contraire résister et exprimer ses opinions pour pouvoir évoluer personnellement. L’humanité doit ainsi vivre dans l’anticonformisme pour que sa liberté individuelle soit respectée. Mais cela me mène à me questionner sur le fait que l’anticonformisme lui-même peut-être dangereux en ceci qu’il peut se transformer en conformisme : un individu voulant absolument vivre en dehors des conventions et se détacher systématiquement par anticonformisme en faisant l’inverse voit ainsi sa liberté individuelle entravée puisqu’il se borne à produire sans réfléchir la pensée inverse d’une convention.

Conclusion

Pour conclure nous avons mis en avant au cours de notre développement dans un premier temps les différentes raisons qui poussaient à vivre avec notre temps et qui constituent une mémoire pour avoir un regard juste sur la manière d’appréhender le monde ; dans un second temps nous avons pu constater que l’obligation de vivre avec son temps comportait des risques de conduire au conformisme par la stagnation de l’individu dans le présent ; dans un dernier temps nous avons démontré qu’il fallait trouver un juste milieu et prendre un certain recul avec l’expression « il faut vivre avec son temps » qui doit s’appliquer pour garder en mémoire les acquis du passé et ne pas vivre dans une autre époque mais ne surtout pas être contraint à rester prisonnier dans l’instant présent. Mais à ce stade je ne peux m’empêcher de me questionner, avoir une mémoire et une liberté d’esprit qui permettra d’évoluer suffit-il ? Ne serait-il pas nécessaire que chacun s’engage pour construire le meilleur des avenirs possibles ?

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