La liberté est-elle une donnée ou une conquête ?

Ceci est la dissertation complètement rédigée. Note obtenue: 12/20.

Dernière mise à jour : 30/08/2021 • Proposé par: m17 (élève)

Il est d’usage de considérer que la liberté résulte du fait qu’un être peut faire ce dont il a envie, spontanément et sans contraintes. Dans cette optique on pourrait se demander : qu’est ce qui amène l’homme à être libre? On en vient alors à se questionner sur le fondement de cette liberté : La liberté serait-elle innée ? Ou bien faudrait-il l’atteindre au fur et à mesure d’efforts ? Y aurait-il différents degrés de liberté vers lesquels l’homme devrait progresser ? Et enfin, on peut être amener à se demander si la liberté est une réalité accessible.

Dans un premier temps, nous défendrons la thèse que la liberté est une donnée, puis nous nous attacherons à montrer que la liberté est une conquête, et nous finirons sur l’idée de liberté illusoire.

I. La liberté est une donnée de par notre conscience

La croyance c’est l’ensemble des choses qui provoquent mon assentiment parce qu’elles correspondent à ce que je suis. Les croyances portent sur tout ce que les hommes sont enclins à penser compte tenu du fait qu’ils sont hommes. Ici nous parlons plus précisément de la notion de liberté. La liberté est une des croyances fondamentales de l’homme, si ce n’est la plus profonde. En effet ici on assiste au fonctionnement de la volonté dans le miroir de la conscience. L’homme par sa conscience se convainc qu’il est libre, il se croit libre et aucun évènement ne peut altérer, modifier ce jugement. C’est l’idée qu’appuie Rousseau dans cette citation : « un raisonnement a beau me prouver que je ne suis pas libre, le sentiment intérieur, plus fort que tous ces arguments, les dément sans cesse ». C’est l’homme lui même qui a instauré cette notion de la liberté (ce qui le distingue sur ce point des animaux). Descartes aussi, érige la conscience comme fondement de toute certitude. Elle est ce qu’il y a de plus certain au monde. Il écrit, dans les Méditations métaphysiques : « je pense, donc je suis » d’où on peut extrapoler le fait que l’homme soit libre s'il se pense libre. On retrouve aussi la conception que la liberté est une donnée, au niveau juridique, dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, Article 1er, du 26 août 1789 : « Les hommes naissent et demeurent libres (et égaux) en droits.». D’après cet article les hommes aurait acquis ce statut dès la naissance.

La conscience de l’homme lui permet d’user de son pouvoir de choix. Etre libre, c’est avoir le choix. Il n’y a de liberté que s’il y a une alternative offerte à l’individu. C’est le point de vue que défendait Descartes, lorsqu’il écrivait : «La liberté consiste seulement en ce que nous pouvons faire une chose ou ne pas la faire». Un homme est libre lorsqu’il se situe dans une égalité parfaite entre deux choix qui s’offrent à lui. Ce qui rappelle l’expérience de pensée, dite de l’âne de Buridan, qui est par ailleurs liée à la notion de liberté d’indifférence. On retrouve aussi cette notion, à un niveau supérieur dans le choix entre les deux orientations que sont le Bien et le Mal. En effet dans la religion, la liberté morale est fondée sur le libre arbitre. Sans libre arbitre l’homme est déterminé à choisir, donc non responsable, et c’est Dieu qui l’a fait coupable de ses péchés. Avec le libre arbitre l’homme devient coupable de ses choix et Dieu est innocent : l’homme récupère ainsi sa liberté, car le déterminisme a disparu. La liberté est donc une donnée dans le fait qu’elle se présente à l’homme, sans qu’il n’ait rien à construire ou à acquérir auparavant. C’est la vie qui met l’homme devant un choix, ce n’est pas l’homme qui fait en sorte de se retrouver face à ce choix, la liberté n’est donc pas une conquête.

Mais si la liberté est une donnée, comment se fait-il que tous les hommes ne soient pas libres ? Dans ce sens, la liberté ne serait-elle pas plutôt une conquête ?

II. Mais cette liberté peut être obstruée par les instincts et l'ignorance

Etre libre, c’est être en mesure de déterminer intellectuellement la totalité des processus qui a conduit à la production d’un acte. Or l’homme cherche à atteindre cette liberté par le biais de l’apprentissage, de l’éducation...

La liberté est donc une conquête dans le sens ou elle «se révèle» au fur et à mesure d’un «labeur». C’est ce que défend Talleyrand dans le Rapport sur l’instruction publique, en 1791 : «Celui qui ne sait ni lire ni compter dépend de tout ce qui l’environne ». Pour lui, un homme savant est donc plus libre qu’un homme ignorant dans la mesure où il n’est pas soumis à son environnement, son entourage... L’homme a pu aussi améliorer son rapport à la Nature, dans la mesure ou grâce au progrès des sciences et des techniques, l’homme arrive à dominer la nature, au lieu de la subir (on peut alors penser aux domaines de la médecin ou de la climatologie par exemple...). De plus pour Spinoza la liberté est connaissance de la nécessité, ce qui implique que l’homme s’attelle à se connaître lui même : «J’appelle libre, quant à moi, une chose qui est et agit par la seule nécessité de sa nature». On retrouve une analogie dans le raisonnement de Marx et de Hegel, pour qui la liberté purement légale reste formelle. La liberté n’est pas un statut, un état, mais un processus historique de libération par le travail. Le maître est pour eux condamné par l’histoire, et c’est l’esclave qui devient le nouveau maître en transformant la nature par son travail : «Le travail rend libre.»

L’apprentissage permet à l’homme de parvenir à maitriser ses instincts. L’enfant, comme l’animal est esclave de ses instincts. Il lui faut apprendre, par exemple, le respect de la liberté d’autrui, par la maîtrise de ses instincts naturels. On devient libre par autodiscipline, par obéissance volontaire à une loi rationnelle, qu’on appelle autonomie. C’est le point de vue que défend Rousseau, lorsqu’il écrit : « L’obéissance à la loi que l’on s’est prescrite est liberté ». En effet, comme dit précédemment l’homme qui a le choix est un homme libre. Or ce choix doit se faire sans que l’homme ne soit plus tenter par un choix que par l’autre, l’homme doit choisir après réflexion et non à cause de penchants. L’homme doit par conséquent apprendre à maîtriser ses instincts et ses envies. Reprenons l’exemple de l’enfant qui est un être totalement soumis à ses instincts : « Ainsi croit le bébé aspirer librement au lait, et l’enfant en colère vouloir la vengeance, et le peureux la fuite. Si bien que l’expérience elle même montre que les hommes se croient libres pour la seule raison qu’ils sont conscients de leurs actions, et ignorants des causes pas quoi elles sont déterminées. » Spinoza, Ethiques, IIIè partie, Scolie de la prop.2. L’homme peut donc, à force de travail, apprendre à maîtriser ses envies : Kant, dans Critique de la raison pratique : « Tout individu peu importe la force de ses penchants peut toujours y résister. Nous savons tous que nous pourrions résister face à la crainte de ce maître absolu qu’est la mort ».

Les hommes en fonction de leur parcours dans la vie serait alors plus ou moins libres, car plus ou moins aptes à se maîtriser et savants. Mais existe-t-il différents degrés de liberté ? Peut-on fractionner une notion comme la liberté ? Ceci amènerait l’homme sur la voie d’une liberté illusoire.

III. La liberté peut surtout être empêchée par l'environnement, et devient dès lors une conquête

Chacun d’entre nous appartient à un processus de causes et d’effets qu’il ne peut répudier. L’homme ne peut renoncer à sa nature propre. Il est dépositaire d’un certain héritage, aussi bien sur le plan biologique, sociologique qu’idéologique. Or il existe une théorie philosophie selon laquelle les phénomènes naturels et les faits humains sont causés par leurs antécédents qu’on appelle le Déterminisme. L’homme serait donc déterminé, et son avenir en quelques sortes déjà tracé. Cette idée a été défendue par Spinoza , dans Ethiques, III, 14 lorsqu’il écrivait : « L’homme peut-il être un empire dans un empire ? ». De plus l’homme de par sa nature est conditionné, tout d’abord physiquement (par exemple un homme ne peut ni marcher sur l’eau ni voler, du moins, sans aide), mais il l’est aussi psychologiquement (dans sa manière de réagir face aux évènements). Ce héritage «pèse» sur chaque être humain et le détermine plus ou moins.

En plus d’être prédéterminé par sa nature, l’homme est esclave de son environnement et des contraintes qui y sont liées. L’homme est enfermé dans le carcan de son environnement. En effet, il résulte d’une succession de causes et d’effets dont il ignore l’origine, cet ensemble d’éléments constitue son environnement. Certes la situation de choix permet à l’homme d'user de sa liberté, mais quand, où et comment survient le choix, c'est le monde environnant qui lui impose, c’est une action extérieure. L’homme n’a pas toujours à émettre de préférence sur telle ou telle chose accessible à sa volonté! On ne peut effectivement pas restreindre la liberté au simple choix! La plupart du temps dans la vie il n'y a pas d'alternatives clairement énoncées et la liberté consiste à déterminer son action justement à partir d’alternatives qui ne sont pas clairement fixées! Or les contraintes sont l’opposé de la liberté, l’homme n’est donc pas libre parce qu'il a le choix. L’homme a seulement l’illusion d’être libre. En effet Montesquieu, dans De l’esprit des lois écrivait : «La liberté consiste à pouvoir faire ce qu'on doit vouloir, et à n'être pas contraint de faire ce qu'on ne doit pas vouloir ». La liberté recherchée serait alors du côté d'une nature humaine qui pouvait encore s'exprimer spontanément, sans avoir été dévoyée par la contrainte d'un pouvoir d'autrui. La liberté serait du côté de la spontanéité.

Mais faut-il alors vouloir vivre spontanément ? Pour le dire autrement, faut-il vouloir satisfaire tous ses désirs à mesure qu'ils se révèlent à la conscience ? Notons d'emblée qu'une existence totalement spontanée est impossible parce qu'inadéquate à la structure du monde : l'objet du désir ne pourra jamais être toujours présent à disposition et en abondance! Bref si l'on appelle contrainte ce qui s'oppose à la spontanéité, alors il faut reconnaître que vivre ne peut être que contraignant. La spontanéité ne peut donc pas non plus constituer un idéal absolu de liberté. Un autre aspect de la liberté consiste à montrer qu’un homme maître de lui même est libre, c’est ce que reprend Descartes, dans Méditation 6 : Pour lui, l’homme doit « Etre comme un pilote en son navire », c’est à dire être capable de percevoir de l’extérieur des évènements qui concernent son corps. Or être maître de soi est une condition totalement inaccessible pour les êtres humains, car nous sommes tous sensibles à ce qui nous entoure. De plus, on a estimé que l’homme acquérait sa liberté par un apprentissage. Or l’apprentissage nie d’une certaine façon la liberté , dans la mesure où l’on a tendance à assimiler liberté et spontanéité.

Conclusion

Même s’il est vrai que dans une certaine mesure la liberté est une donnée, elle semble tout de même être d’avantage une conquête, sinon tous les hommes auraient « la même liberté ». Mais il faut affirmer que toute liberté que l’homme atteint n’est qu’une liberté illusoire. En effet, l’homme arrive seulement à acquérir l’illusion de la liberté car il ne peut être en mesure de déterminer intellectuellement la totalité des processus qui l’ont conduit à la production d’un acte. Le seul être libre serait donc Dieu ?