Tocqueville, De la démocratie en Amérique: Majorité et justice

Corrigé sous forme de plan détaillé en trois parties :
I. Une conception de la justice dépassant le droit national,
II. Une souveraineté d’un peuple non-absolue,
III. Les limites de la justice démocratique

Dernière mise à jour : 16/03/2021 • Proposé par: meyerk (élève)

Texte étudié

Je regarde comme impie et détestable cette maxime, qu'en matière de gouvernement la majorité d'un peuple a le droit de tout faire, et pourtant je place dans les volontés de la majorité l'origine de tous les pouvoirs. Suis-je en contradiction avec moi-même?
Il existe une loi générale qui a été faite ou du moins adoptée, non pas seulement par la majorité de tel ou tel peuple, mais par la majorité de tous les hommes. Cette loi, c'est la justice.
La justice forme donc la borne du droit de chaque peuple.
Une nation est comme un jury chargé de représenter la société universelle et d'appliquer la justice qui est sa loi. Le jury, qui représente la société, doit-il avoir plus de puissance que la société elle-même dont il applique les lois?
Quand donc je refuse d'obéir à une loi injuste, je ne dénie point à la majorité le droit de commander; j'en appelle seulement de la souveraineté du peuple à la souveraineté du genre humain. Il y a des gens qui n'ont pas craint de dire qu'un peuple, dans les objets qui n'intéressaient que lui-même, ne pouvait sortir entièrement des limites de la justice et de la raison, et qu'ainsi on ne devait pas craindre de donner tout pouvoir à la majorité qui le représente. Mais c'est là un langage d'esclave.
Qu'est-ce donc une majorité prise collectivement sinon un individu qui a des opinions et le plus souvent des intérêts contraire à un autre individu qu'on nomme la minorité? Or, si vous admettez qu'un homme revêtu de la toute-puissance peut en abuser contre ses adversaires, pourquoi n'admettez-vous pas la même chose pour une majorité? Les hommes, en se réunissant, ont-ils changé de caractère? Sont-ils devenus plus patients dans les obstacles en devenant plus forts?
Pour moi je ne le saurais le croire; et le pouvoir de tout faire, que je refuse à un seul de mes semblables, je ne l'accorderai jamais à plusieurs.

Tocqueville, De la démocratie en Amérique

I. Une conception de la justice dépassant le droit national

A. Le principe démocratique

La démocratie a engendré de nombreux débats. Des philosophes comme Platon ou encore Aristote était contre ce principe tandis que Rousseau est d’avis contraire en approuvant totalement. A l’époque de Tocqueville, la démocratie apparaît comme un acquis historique qui ne peut être contesté. Mais qu’est-c que la démocratie ? Les pouvoirs qui étaient, à l’époque, sous l’emprise d’une seule et même personne sont désormais soumis à une majorité. Cette majorité énonce donc ce que la plupart de la population en pense. Néanmoins, Tocqueville refuse que la majorité ait le droit de tout faire. Des limites doivent être fixées malgré une opinion publique majoritaire.

B. Les dangers de ce principe

Tocqueville qualifie ainsi cette conséquence de maxime, faisant par là référence au philosophe Kant. Pour ce dernier, la maxime est un principe, qui peut être moral ou pratique, dont le but est de vérifier la portée. Autrement dit, toute maxime en relation avec l’universalité est acceptable ; les autres doivent être bannies. Dès lors, Tocqueville donne une définition plus ou moins complète d’une loi qui a été adoptée majoritairement par la population et non par un groupe de personnes. Etant donné l’avis positive de plus de la moitié de la population, la loi adoptée est sensée représenter la justice et est, par conséquent, universelle. Ainsi, la justice est recevable uniquement si elle est en conformité avec ses lois.

C. La supranationalité de la justice

Entre ce que peut décider la justice et le peuple relève d’une différence de niveaux qui est incontestable. En effet, le peuple dispose moins de connaissances dans le domaine du droit que les avocats ou encore les juges. Néanmoins, la justice, dans sa définition même, dépend de la majorité des hommes. Dès lors, la justice forme les limites de territoires qui ne peuvent être dépassées. Ainsi, aucun droit national ne peut aller en sens inverse de la justice.

II. Une souveraineté d’un peuple non-absolue

A. La contradiction d’une loi injuste

Malgré qu’une loi soit acceptée grâce à une majorité, elle peut être tout de même injuste. Dès lors, à qui rime cette injustice ? La seule réponse possible est qu’elle ne respecte pas la justice. La nation représente la société universelle et se doit de faire appliquer les lois de la justice. Ainsi, elle n’est qu’une simple représentante de l’universalité et, par conséquent, elle ne peut aller à l’inverse de celle-ci.

B. Les différentes souverainetés

Une loi injuste est dut à une inversion de puissance dans la mesure où la majorité nationale se veut plus forte que la majorité universelle. En effet, lorsque nous désobéissons à une loi injuste, n’est-ce pas aller contre la majorité ? Le principe de la démocratie est d’affirmer que la souveraineté est à tous et pas à une seule personne et, de ce fait, elle repose sur le respect de la souveraineté.

C. La possibilité d’une majorité injuste ?

Dès lors, comment la souveraineté d’un peuple, telle que représente la majorité, peut aller ainsi contre la justice ? Pour répondre à cette question, Tocqueville compare la majorité et la minorité à deux personnes aux intérêts contraire. Il en conclut que il y a un risque que la majorité tombe dans le despotisme dans la mesure où elle userait de sa puissance à tout bout de champs. Ainsi, la démocratie, qui refuse le despotisme de chacun, serait donc contrainte à l’accepter puisque se serait un despotisme populaire.

III. Les limites de la justice démocratique

A. Une critique interne nécessaire

La démocratie prône la population à s’exprimer comme bon le semble. Ainsi, pour dénoncer une loi injuste, il n’est pas nécessaire de l’enfreindre mais d’oser une critique de la majorité. De nos jours, elle se fait le plus souvent par la voix de la presse pourvu qu’elle soit illustrée par des preuves concrètes.

B. Le recours national

L’évolution des démocraties confirme ce que Tocqueville énonce sur la supranationalité de la justice. Des cours internationale ont été construites pour contester un désaccord avec les lois nationales. Dès lors, il semble les lois nationales et la majorité ne sont pas synonymes de lois universelles.