Corneille, Nicomède - Acte III, scène 3

Commentaire linéaire entièrement rédigé avec 2 axes de lectures :
I. Une confrontation entre Nicomède et Flaminius où les rôles sont flous,
II. Un tournant dans la pièce avec Nicomède qui sort vainqueur du duel verbal

Dernière mise à jour : 15/09/2021 • Proposé par: dianes2 (élève)

Texte étudié

Nicomède, Laodice, Flaminius.

NICOMÈDE

Ou Rome à ses agents donne un pouvoir bien large,
Ou vous êtes bien long à faire votre charge.

FLAMINIUS

Je sais quel est mon ordre, et si j'en sors ou non,
C'est à d'autres qu'à vous que j'en rendrai raison.

NICOMÈDE

Allez-y donc, de grâce, et laissez à ma flamme
Le bonheur à son tour d'entretenir madame :
Vous avez dans son coeur fait de si grands progrès,
Et vos discours pour elle ont de si grands attraits,
Que sans de grands efforts je n'y pourrai détruire
Ce que votre harangue y voulait introduire.

FLAMINIUS

Les malheurs où la plonge une indigne amitié
Me faisaient lui donner un conseil par pitié.

NICOMÈDE

Lui donner de la sorte un conseil charitable,
C'est être ambassadeur et tendre et pitoyable.
Vous a-t-il conseillé beaucoup de lâchetés,

Madame ?

FLAMINIUS

Ah ! C'en est trop ; et vous vous emportez.

NICOMÈDE

Je m'emporte ?

FLAMINIUS

Sachez qu'il n'est point de contrée
Où d'un ambassadeur la dignité sacrée...

NICOMÈDE

Ne nous vantez plus tant son rang et sa splendeur :
Qui fait le conseiller n'est plus ambassadeur ;
Il excède sa charge, et lui-même y renonce.
Mais dites-moi, madame, a-t-il eu sa réponse ?

LAODICE

Oui, Seigneur.

NICOMÈDE

Sachez donc que je ne vous prends plus
Que pour l'agent d'Attale, et pour Flaminius ;
Et si vous me fâchiez, j'ajouterais peut-être
Que pour l'empoisonneur d'Annibal, de mon maître.
Voilà tous les honneurs que vous aurez de moi :
S'ils ne vous satisfont, allez vous plaindre au roi.

FLAMINIUS

Il me fera justice, encore qu'il soit bon père,
Ou Rome à son refus se la saura bien faire.

NICOMÈDE

Allez de l'un et l'autre embrasser les genoux.

FLAMINIUS

Les effets répondront. Prince, pensez à vous.

Corneille, Nicomède - Acte III, scène 3

Introduction

Corneille propose avec Nicomède une tragédie politique d’un genre nouveau, informant son lecteur dans la préface que « la tendresse et les passions, qui doivent être l’âme des tragédies, n’ont aucune part en celle-ci : la grandeur du courage y règne seule, et regarde son malheur d’un œil si dédaigneux qu’il n’en serait arracher une plainte ».

Contrairement au récit de l’historien Justin dont s’inspire l’intrigue, le dramaturge renonce à faire de son héros un parricide. Ni pitié, ni terreur comme il est de coutume dans la tragédie : Corneille souhaite avant tout que Nicomède ne suscite qu’admiration.

L’action de la pièce est une querelle de succession : la question étant qui de ses deux fils Prusias va désigner pour lui succéder, Nicomède, héros chargé de lauriers, ou Attale, fruit d’un second lit et créature de Rome.
Véritable tragédie politique qui met en scène la pax romana, la politique romaine envers ses alliés qu’elle veut soumis et serviles.

La scène qui précède l’extrait que l’on va étudier constituait un discours argumentatif de Flaminius, qui tentait de convaincre Laodice de l’intérêt que peut représenter son mariage avec Attale, justifiant l’intervention de Nicomède qui s’indigne des discours manipulateurs de son rival.

Cette scène 3 de l’acte III constitue un duel d’arguments avec montée progressive de la tension. Confrontation entre Nicomède, héros de la pièce et Flaminius son adversaire, ambassadeur de Rome. Cour du roi se remplit alors du jeu des intérêts.

Projet de lecture

On prêtera une attention particulière d’une part à la répartition des rôles des protagonistes qui pose véritablement problème, les 2 personnages n’arrivant pas à s’accorder sur une définition commune de leurs rôles respectifs.

D’autre part on essaiera de montrer au contraire de Voltaire qui a dit en parlant de la pièce que « la plupart des scènes ne sont que des conversations assez étrangères à l’intrigue » que cette scène constitue un tournant dans la pièce puisqu’elle établit Nicomède comme vainqueur du duel verbal, annonçant dès lors l’échec des projets de Flaminius.

Mouvement du texte

I. Confrontation entre Nicomède et Flaminius avec une montée progressive de la tension, sans savoir encore qui des 2 sera le vainqueur de ce duel de pouvoir

II. Nicomède parle plus, ses répliques sont plus longues, Laodice s’est rangée de son coté, a le dessus et Flaminius sortira d’ailleurs de scène le 1e

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