Peut-on se contenter de travailler pour vivre ?

Dissertation sans introduction en trois parties :
I. Travailler suffit à survivre,
II. Le travail suffit même pour se réaliser,
III. Mais le travail en aliénant l'homme ne suffit pas à son bonheur.
Commentaire du professeur : «Ce devoir est nettement marqué par les théories marxistes mais il est équilibré et plutôt bien mené. On aurait pu partir, pour une problématique encore plus claire du seul énoncé et de ses sous entendus : s'il faut travailler pour vivre et si seul le travail fait vivre, alors tout ce qui est "travaillant" est aussi, "vivant". Mais un robot, quoique travaillant, n'est pas vivant. C'est donc que l'on accorde un sens particulier au verbe vivre quand on considère l'humain vivant. 13/20.».

Dernière mise à jour : 15/09/2021 • Proposé par: yazata (élève)

Analyse des termes

- "Peut-on" a une double signification; celle du droit moral, et celle de la possibilité.
- "travailler" peut se faire de deux façons différentes : le travail se décompose soit en tâches, soit en métiers.

Problématique

Le travail suffit-il à réaliser la nature humaine?

I. Travailler suffit à survivre

Si on s'en tient à la notion biologique du terme vivre comme quoi un organisme existe et respire, on peut se contenter de travailler pour vivre car le travail est l'activité humaine dont la finalité est la satisfaction des besoins naturels vitaux.

Mais pour un être humain, il ne suffit pas de satisfaire ses besoins pour vivre ; il faut que l'homme se serve de sa raison pour être considéré comme vivant ! Or le travail est une nécessité naturelle vitale donc la nature détermine le travail donc la conscience de l'homme ne joue pas ce qui est une aliénation ! Les Grecs pensaient que seul le loisir, l'utilisation libre de la raison dans des domaines tels que la politique ou la philosophie, était conforme à la nature humaine et que l'on était esclave parce que l'on travaillait. Il est donc vrai que le travail est la soumission aux nécessités naturelles et l'activité par laquelle les hommes tentent de subvenir à leur besoins, ce qui pour un être pensant est une aliénation.

Mais le mythe de Prométhée rapporté par Platon dans le Protagoras nous incite à revenir sur cette pseudo évidence! L'homme est le plus démuni de tous les animaux mais il possède la technique, la modification de la nature au moyen de la raison : l'homme invente des moyens pour subvenir à ses besoins car contrairement à l'animal, la nature ne lui a pas dicté comment subvenir à ses besoins. C’est par la technique que nous allons montrer que parce que le travail est technique il n'est pas une aliénation.

II. Le travail suffit même pour se réaliser

Le travail est la transformation de la nature au moyen de la raison. C'est ainsi que Marx affirme dans le livre 1er du Capital que "la différence entre la plus experte des abeilles et le plus malhabile des architectes c'est que ce dernier construit d'abord la maison dans sa tête". Le travail est le propre de l'homme, le propre d'un être pensant : être un travailleur c'est utiliser sa nature d'être pensant même pour un travail manuel.

Cependant, le travail conserve bien comme finalité le fait de subvenir à ses besoins. L'usage de la raison est donc soumis aux nécessité naturelles, elle est instrumentalisée! On ne peut donc pas réfuter la vison grecque du travail comme quoi seul le loisir, l'usage libre de la raison est entièrement conforme à la nature de l'homme.

En travaillant, en se soumettant aux nécessités de la nature, l'homme se libère de sa domination. Hegel dans sa Dialectique du maitre et de l'esclave montre qu'il faut passer par une médiation par le travail pour acquérir une conscience de soi. Le travailleur a conscience de lui même conne réalité objectale, c'est à dire qu'il se reconnait dans ce qu'il produit.

Le travail est donc suffisant pour réaliser la nature humaine car il est permet à l'homme d'utiliser sa raison.

III. Mais le travail en aliénant l'homme ne suffit pas à son bonheur

Pourtant, le travail est aliénant pour la plupart des gens. Pour expliquer cela, il faut comprendre comment se déroule le travail dans notre société.
Depuis la révolution industrielle, le travail se divise en deux catégories : le métier, qui est une spécialisation dans une certaine catégorie, et la tâche, qui est une division au sein d'un même métier.

Mais lorsque le travailleur accomplit une tâche, il ne produit rien ! Il est utilisé comme une force, comme une partie de la machine ce qui constitue une aliénation rejaillissant même dans les heures de loisir. Selon Marx, l'homme utilisé comme une marchandise est le "prolétaire", et ceux qui possèdent le capital et qui achètent les hommes sont les "capitalistes". A partir du moment où il y a des manufactures, seuls ceux ayant un capital peuvent produire, et ceux qui n'en ont pas deviennent une marchandise et vendent leur force. C'est l'organisation du travail qui fait que certains hommes en aliènent d'autres : l’aliénation ne se fait pas entre l'homme et le travail mais entre les hommes eux-mêmes. Le développement technique et économique a rendu possible l’aliénation.

Conclusion

Le travail est donc une liberté qui permet de réaliser la nature humaine en droit, mais en fait, la division du travail dans notre société fait que le travail est devenu une aliénation pour la plupart des travailleurs! Le loisir, l'utilisation libre de la raison devrait permettre aux hommes d'utiliser leur raison, et ainsi de pallier la non-utilisation de la raison, mais l’aliénation dans le travail rejaillit dans le loisir et transforme ce dernier en divertissement où la conscience ne joue pas.