Série L: Doit-on tout faire pour être heureux?
Mis en ligne le 16/06/2014
Avertissement : il ne s’agit ici que de pistes de réflexion et non d’une copie type nécessairement attendue par vos correcteurs. D’autres approches, d’autres thèses et arguments sont possibles.
Remarque générale. Sujet sans difficulté particulière. Sa formulation est classique. Il est indispensable de relever que le verbe devoir peut avoir deux sens : celui d’un conseil pratique (ex : Si tu veux bien vivre, tu dois tout faire pour être heureux) et celui d’une obligation morale (ex : tu as le devoir de tout faire pour être heureux). Il faut aussi prêter une attention particulière à l’expression « tout faire » et s’interroger sur sa portée : que signifie ce « tout » ? Jusqu’à quel point faut-il se donner les moyens d’être heureux ? En arrière plan, se profile une question, elle aussi, classique : ne risque-t-on pas de passer à côté du bonheur à force de le chercher ? Enfin, on notera que ce sujet fait principalement intervenir deux notions du programme : le bonheur, bien sûr, et la morale (ou le devoir).
Introduction / Problématisation.
À la différence de l’animal, l’homme ne se contente pas du bien-être physique et psychique et d’un état de contentement de ses besoins. Animé par le désir, il est en quête d’une satisfaction absolue, d’un état de plénitude durable où la perception du manque a disparu et qu’on appelle régulièrement le bonheur. De ce fait, la vie de l’homme s’organise, consciemment ou non, autour de cette visée du bonheur. Est-ce à dire que l’homme a l’obligation d’être heureux ? Si l’on prend le terme en un sens moral, il semble que le devoir de tout faire pour être heureux n’existe pas : en effet, nos devoirs s’adressent principalement à autrui et, dans le cas présent, on ne voit pas bien de quelle violation d’un principe moral autrui pourrait être victime si je ne fais pas tout pour être heureux. Dans le même temps, ne peut-on pas considérer qu’il existe une forme de devoir envers soi-même qui nous ordonne de fuir le malheur, d’entretenir l’espoir et de mener son existence selon l’idée que l’on se fait d’une vie bonne, digne d’être vécue ?
Mais si l’on entend ici qu’il s’agit de se donner tous les moyens possibles pour être heureux, le verbe devoir prend le sens d’un impératif pratique et le problème devient tout autre. En effet, il faut travailler à son bonheur, s’en donner les moyens pour parvenir aux buts auxquels on identifie l’obtention du bonheur. Cependant, rien ne la garantit jamais car, premièrement, il n’existe pas de recette tout faite, toute prête pour le bonheur et, deuxièmement, parce que la visée effrénée du bonheur risque d’entretenir une état d’insatisfaction permanent incompatible avec sa définition même.
Première partie. L’homme ne peut pas ne pas rechercher le bonheur.
Le bonheur est le Souverain Bien, dit Aristote dans Éthique à Nicomaque. Il est tout en haut de la hiérarchie des biens et les commande tous : cela signifie que tout ce que les hommes font est en vue du bonheur. L’homme ne peut donc pas se soustraire à sa recherche. Comme le disait un peu cyniquement Pascal, même celui qui tente de se suicider cherche la voie vers son bonheur car il met fin à son malheur. La nature de l’homme en est responsable : être de désirs, il est travaillé par un manque, une absence auxquels le contentement de ses besoins ne peut mettre un terme.
De fait, tout ce qu’il fait peut être interprété comme moyen en vue du bonheur.
Ces observations relèvent d’un constat de fait. Mais qu’en est-il en droit ? En effet, si l’homme se trompe sur les moyens qu’il utilise pour être heureux (par ex : un drogué), a-t-il l’obligation de tout faire pour en changer ? Y a-t-il un devoir moral d’échapper au malheur ?
Deuxième partie. La recherche du bonheur n’est pas une obligation morale.
On relèvera qu’il y a une contradiction à affirmer qu’il existe un devoir moral de tout faire pour être heureux. En effet, par définition, l’obligation suppose la contrainte dans la mesure où on ne l’accomplit pas spontanément, sinon ce n’est plus une obligation. Or, cela reviendrait à dire qu’il faut se forcer à être heureux, un peu comme si on nous ordonnait de nous amuser ou de faire la fête…
De plus, la définition du bonheur n’est pas univoque et les moyens d’y parvenir restent indéterminés. La richesse, par exemple, peut mener au bonheur mais aussi entraîner notre perte. Rien n’est jamais sûr concernant le bonheur : il n’existe pas de recettes y menant automatiquement et durablement. Du coup, intimer l’ordre de tout faire pour être heureux reviendrait à entraîner l’homme dans une quête infinie qui, au lieu de mettre fin à l’état d’insatisfaction induit par son désir, relancerait en permanence celui-ci et entretiendrait le doute quant à la possibilité de mener une vie bonne, digne en elle-même d’être vécue : de quoi ai-je encore besoin pour être heureux ? ma position sociale est-elle satisfaisante ? puis-je être fier de moi ? etc. Le moyen utilisé – l’obligation – se révèlerait donc incompatible avec la fin visée – un état de plénitude durable. L’obligation de tout faire pour être heureux exciterait le désir au lieu de l’apaiser et produirait l’effet inverse de celui escompté : la frustration.
Est-ce à dire qu’il ne faut pas agir en vue de notre bonheur et ne pas le rechercher ? Nous avons vu, en première partie, que ce n’était pas possible. Pour autant, il faut sans doute se libérer d’une forme d’injonction au bonheur pour y parvenir vraiment.
Troisième partie. Le bonheur est de l’ordre de l’évènement plus que de la production.
L’expression « Tout faire pour être heureux » présuppose que le bonheur s’envisage comme une production : un objectif clairement identifié et des moyens assignés pour s’en approcher. Or, le bonheur nous arrive très souvent sans que nous en soyons à l’origine et sans que nous l’ayons explicitement cherché. L’étymologie de bonheur renvoie à la « bonne heur », c’est-à-dire à l’heureuse rencontre, au moment favorable, à la chance. Certes, nous visons le bonheur, que nous le voulions ou non, en chacun de nos actes mais, paradoxalement, nous risquerions de nous rendre étrangers et indisponibles à sa rencontre à force de trop vouloir le chercher en le produisant, c’est-à-dire en étant en permanence mobiliser par l’obligation de se donner les moyens d’être heureux. Le bonheur se vit et s’éprouve, or nous ne vivons que l’instant. Faire du bonheur un projet permanent constitue le meilleur moyen de ne jamais le rencontrer puisque, dans ce cas-là, nous sommes toujours orientés vers l’avenir ( le moment à venir).
Conclusion
Il ne saurait exister d’obligation morale d’être heureux sous peine de se condamner au malheur. Le bonheur exige, paradoxalement, une part de renoncement à la recherche du bonheur, si l’on entend par là « tout faire pour être heureux ».
Par Mathias Roux
Normalien et agrégé de philosophie, Mathias Roux enseigne au lycée Victor-Louis, à Talence (Gironde). Il s’est intéressé à des sujets aussi divers que le sport (Socrate en crampons. Une introduction sportive à la philosophie, Flammarion, 2010) et la politique (J’ai demandé un rapport. La politique est-elle une affaire d’experts ? Flammarion, 2011). Il vient de publier S’estimer soi-même avec Descartes (Eyrolles, 2016).
doit-on tout faire pour être heureux?
II.Les hommes peuvent etre heureux en se contentant de ce qu'ils ont (sans chercher un bonheur superficiel il doit se réduire aux bonheurs accessibles et il doit être raisonnable..ect ) j'ai également évoqué la république de Platon pour l'exemple de la caverne ^^ en gros j'ai dis que les hommes d'ojd sont obnubilés par la folie des grandeurs qui est renforcée par notre société de consommation, que les hommes oublient les principes qui les rendent heureux (liberté) en suite j'ai dit que c'était dans la nature de l'homme de toujours vouloir plus que ce qu'il possédait, que c'est un être qui ne cesse d'évoluer qui se lasse rapidement de ses biens, et que c'est le seul etre capable de rêver, de désirer et qu'il est prêt a n'importe quoi pour son bien être, son bonheur qu'il ferait des sacrifices ect ect..