Corrigé-texte
de Nietzsche sur le langage.
Thèse
: le mot, signe linguistique, est un concept.
Problème
: rapports langage et réalité/vérité.
Les mots sont-ils capables de dire la nature des choses? (Cf. sujet
bac blanc : "les mots cachent-ils les choses").
Commentaire
(points importants du texte).
Réponse
: non. Les mots, en tant que concepts, ne peuvent dire les choses
telles qu'elles sont vraiment. En effet la réalité
est individuelle. Thèse nominaliste : il n'existe que des
choses différentes entre elles. Les mots, eux, sont généraux
et abstraits. Rejettent par déf tout ce qui différencie
les choses les unes des autres. Ne gardent que ce qui leur est commun,
les ressemblances entre elles, pour les grouper sous les mêmes
mots (toutes les tables, qu'elles soient petites, carrées,
en bois, en marbre, etc., sont regroupées sous le terme de
"table"). Les mots font donc comme si les choses étaient
semblables entre elles, identiques et non seulement différentes.
Font comme si nous avions affaire à une seule et même
chose devant une table carrée ou ronde. C'est "une" table.
Ce
qui est central dans le texte de Nietzsche, c'est la fin : en effet,
ce que montre ici l'auteur, c'est que ce à quoi nous mène
l'usage des mots/concepts, c'est à la croyance en l'existence
de choses identiques, et générales et abstraites.
Les concepts, Nietzsche ne le nie pas, sont des exigences intellectuelles,
et sont utiles (ils nous servent à nous repérer dans
le réel, ils sont économiques, etc) mais ce sont seulement
des outils. Ils ne correspondent à rien de réel. Or,
par habitude, nous croyons facilement qu'ils renvoient à
une entité réelle. Les concept de "feuille", de "table",
renverraient à une chose, la feuille, la table. Par suite,
on a vite fait de dire que le monde sensible, dans lequel il n'existe
que des feuilles et des tables individuelles s'approchant plus ou
moins de la réalité "feuille"/"table", est de l'ordre
de l'apparence. Le monde sensible n'est qu'une approximation de
la vraie réalité, qui elle, existe on ne sait où
-dans un autre monde plus réel que le nôtre, qui en
est le modèle.
Ainsi,
Nietzsche se moque ici de Platon (cf.allégorie de
la caverne) : il lui dit que son monde réel n'est que la
réification de nos concepts.
Intérêt
philosophique.
-On
pouvait discuter ici de la généralité du langage,
qui fait toute sa déficience pour dire les choses. Rapprocher
alors ce texte de la thèse de Bergson. Le langage
est toujours trop large par rapport à la réalité.
-Autre
rapprochement possible : la thèse (empiriste) de Hume
sur l'identité personnelle. Par habitude, on croit facilement
que des choses qui se ressemblent sont identiques et forment une
seule et même chose (exemple : moi à 5 ans ressemble
à moi à 15 ans et moi à 40 ans ressemble à
moi à 15 ans, etc. donc, je suis une seule et même
personne).
NB
: rapprochement possible avec la thèse empiriste en général
: toute connaissance dérive de l'expérience.
-On
pouvait aussi critiquer le texte de Nietzsche sur deux points :
1)
il dit que plus le langage s'éloigne de son origine, plus
il est inadéquat à la réalité; or :
le fait qu'il s'en soit éloigné est justement ce qui
fait qu'il est langage. Un cri, un geste, ne permettent pas de communiquer
autant de choses que les cris et les gestes. Alors, vous pouviez
ici faire une analyse du signe linguistique.
2)
enfin, on peut répondre à Nietzsche que si nos concepts
servent à reconnaître des choses, et à regrouper
sous des mots communs les choses qui se ressemblent, n'est-ce pas
que dans la nature en dehors de nous il y a des qualités
communes aux choses? Si elles se ressemblent, cela ne vient quand
même pas (que) de nous! (Vous pouvez répondre de même
à Hume d'ailleurs). Sans aller jusqu'à refaire du
Platon, pour lequel seules existent des choses générales
et abstraites, on ne peut donc dire que les concepts ne correspondent
à rien dans la réalité, qu'ils sont complètement
subjectifs et arbitraires. Il y a un monde, avec des lois, un ordre
et donc, il y a des essences réelles (des points communs
entre les choses qui se ressemblent)
cf.
l'eau dans une rivière, dans la mer, dans le robinet : toutes,
elles sont de l'eau parce qu'elles ont une composition chimique
réelle : H2O. Pour Nietzsche, H2O est un concept, c'est quelque
chose qui nous permet de réunir toutes ces eaux sous une
même appellation, mais ça n'existe pas en dehors de
nous.
NB
: je traiterai tous ces points dans le chapitre "théorie
et expérience".
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