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Bac philo 2017 - Série L

“Dits et écrits”, Foucault (1978)

Expliquer le texte suivant :

À la limite, la vie, c’est ce qui est capable d’erreur. Et c'est peut-être à cette donnée ou plutôt à cette éventualité fondamentale qu’il faut demander compte du fait que la question de I’anomalie traverse de part en part toute la biologie. À elle aussi qu'il faut demander compte des mutations et des processus évolutifs qu’elle induit. À elle qu’il faut demander compte de cette mutation singulière, de cette « erreur héréditaire », qui fait que la vie a abouti avec I’homme à un vivant qui ne se trouve jamais tout à fait à sa place, à un vivant voué à « errer » et destiné finalement a I’« erreur ». Et si on admet que le concept, c’est la réponse que la vie elle-même donne à cet aléa, il faut convenir que I’erreur est à la racine de ce qui fait la pensée humaine et son histoire. L'opposition du vrai et du faux, les valeurs qu'on prête à l’un et à I’autre, les effets de pouvoir que les différentes sociétés et les différentes institutions lient à ce partage, tout cela même n’est peut-être que la réponse la plus tardive à cette possibilité d’erreur intrinsèque[1] à la vie. Si I'histoire des sciences est discontinue, c’est-à-dire si on ne peut l’analyser que comme une série de « corrections », comme une distribution nouvelle du vrai et du faux qui ne libère jamais enfin et pour toujours la vérité, c’est que, Ià encore, l’« erreur » constitue non pas I’oubli ou le retard d'une vérité, mais la dimension propre à la vie des hommes et au temps de l’espèce.

 

FOUCAULT, Dits et Écrits (1978)



[1] Intrinsèque : qui provient de la vie elle-même.

 

Avertissement : il ne s’agit ici que de pistes de réflexion et non d’une copie type nécessairement attendue par vos correcteurs. D’autres approches, d’autres thèses et arguments sont possibles. 

Introduction / Problématisation

L’erreur est-elle un obstacle au progrès de la vie, de l’homme, de la connaissance ? A cette question, Foucault répond résolument : non. L’erreur, sous ses différentes appellations, lui apparaît au contraire comme fondamentalement fertile. Mais comment justifier une telle affirmation ? L’erreur est-elle le moment négatif d’un mouvement dialectique ou bien ce premier jet de la pensée qui appelle une rectification ? Non : Foucault n’est l’héritier ni de Hegel, ni même de Bachelard. L’originalité du texte vient de ce qu’il ancre l’erreur dans la vie pour en faire le paradigme d’une genèse de la connaissance. 

Partie I.

L’erreur au principe de la vie

La première partie du texte fait de l’erreur le critère du vital. Foucault est ici très proche de la pensée de son maître Georges Canguilhem qui, réfléchissant sur le normal et le pathologique, avait fait de « l’anomalie » la clé explicative du vivant. De fait, on sait qu’en biologie toute norme est relative et qu’à l’origine d’une lignée, on trouve toujours une « monstruosité ». L’anomalie en un sens est première et c’est pourquoi l’erreur est le principe explicatif des mutations par lesquelles Darwin explique l’évolution du vivant.  C’est toujours en cherchant une erreur qu’on peut rendre compte du vivant parce que celui-ci s’adapte à un milieu qui change de manière imprévisible. Le plus adapté est celui qui présente un signe distinctif qui avant la mutation du milieu apparaissait comme une marginalité.

Partie II.

L’erreur au cœur de la connaissance humaine

L’homme lui-même est un produit de cette évolution aléatoire. Il hérite donc de cette propension à l’erreur que porte en elle la vie. Foucault insiste sur la place singulière de l’homme dans l’échelle des êtres. Plus qu’aucun autre animal, il y a en lui du « jeu » qui fait qu’il n’est jamais réductible à l’instinct. Descartes avait perçu déjà que la capacité à se tromper de l’homme n’est pas que faiblesse, car c’est cette capacité qui l’autorise aussi à douter et donc à découvrir que la raison peut se retrouver elle-même par la liberté d’introspection. Il y a chez l’homme un droit « d’errer » qui fait sa grandeur. Paradoxalement, c’est parce qu’il est destiné à l’erreur que l’homme est amené à s’inventer sans cesse et par là à progresser. Le « concept » apparaît alors comme une réponse momentanée et jamais totalement satisfaisante à l’erreur que la connaissance véhicule toujours avec elle. 

Partie III.

L’erreur motrice de l’histoire

Dans la dernière partie du texte, Foucault cautionne la thèse du discontinuisme en épistémologie. Les progrès scientifiques ne peuvent procéder que par « saut », car ils ne sont jamais que le reflet à l’échelle de l’histoire du principe de la vie, d’une évolution par mutation soudaine. Les hypothèses du XVIIe siècle sur le progrès continu des sciences, hypothèse soutenue par exemple par Pascal dans sa Préface au Traité du vide, manquent la dimension essentielle de ce qui fait le progrès de l’humanité : l’erreur comme moteur des connaissances. Foucault y insiste : l’erreur n’est pas ce qui attend d’être rectifié par la découverte de la vérité, mais le surgissement d’une hypothèse qui a sa valeur en elle-même comme toute espèce nouvelle, fut-elle une anomalie à nos yeux.

Vos réactions

Explication de Texte

Le corrigé se rapporte trop au connaissance de Foucault je pense que peut de gens on fait des choses dans ce genre peut être un corrigé plus simple peut être proposé.

Texte de TS

Votre corrigé est une plaisanterie s'il s'adresse à un élève de terminale et non pas à un collègue agrégé.... Les termes employés ne sont pas ceux maîtrisés par un élève d'un lycée : le "paradigme", le débat Canguilhem/fFoucault, le "discontinuisme en épistémologie"... Et on ne leur en demande pas tant. C'est pourquoi ce texte était scandaleusement incompréhensible. Rappelons que les scientifiques n'ont que 3 heures de cours par semaine.
Cordialement

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